Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Présentation partie 3.

klee

A Paris, la rêveuse Isée a donné des cours de français à l'Américain Phillip Hammer avant l'un et l'autre n'en viennent à inventer des histoires où il était question de l'Amérique à divers moments de son histoire et surtout de femmes. Phillip s'en va, certes, mais l'expérience lui a plu d'autant qu'après le montage de leurs histoires communes, il s'est immiscé dans la vie privée de la jeune femme et a incité celle-ci à avoir de nombreuses aventures. Il l'a aussi fait entrer dans sa vie, en lui parlant de Vincent, son jeune amant musicien.Quand cet homme singulier l'invite aux USA, Isée est ravie. Elle découvrira New York certes mais aussi ce fameux Vincent avec lequel elle a conversé sous le masque, en se faisant passer pour Phillip. Mais s'immiscer dans la vie de ces deux hommes va tourner au désavantage d'Isée qui va sortir humiliée de l'expérience. Au jeu de la manipulation, elle n'a pas les bonnes armes...

Heureusement, il y a Zacharie, un jeune américain simple et différent. Avec lui, elle peut commencer à prendre ses distances. Mais est-ce facile ? 

 

Publicité
Publicité
29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Un musée, un tableau. Paul Chabas.

 

CHABAS

 

Toute heureuse d'être à New York, Isée, jeune enseignante, visite en compagnie de Phillip Hammer, son hôte mais aussi, sans lui. La voici au Metropolitan.

Je me débrouillai seule, à pied puis en taxi car l'avenue était longue, puis le retrouvai. Il me conduisit au Métropolitan et me demanda quelle galerie je voulais voir. Je consultai le plan du musée et choisit les Impressionnistes, choix qu'il accepta. Sa culture était grande mais il attendait pour la montrer que je le sollicite, ce que je fis souvent. Je contemplai des chefs d'œuvre de Renoir, de Degas, de Monnet puis m'arrêtai sur un petit tableau de Paul Chabas. J'étais dans une salle du grand musée qui abritait des œuvres moins prestigieuses mais de qualité. Chabas était mort en 1937 et il avait peint cette toile en 1912. Elle représentait une femme encore très jeune qui, nue, se tenait debout sur une grève. De profil, elle couvrait d'une main des seins si petits qu'on était en droit de se demander si elle en possédait vraiment. De l'autre, elle protégeait son sexe. Son corps fin et blanc était assez androgyne mais son visage de jeune adolescente possédait une grâce féminine qu'accentuaient ses courts cheveux blonds et fins. C'était l'aube. Je commentai cette toile à Phillip car elle m'interpellait et il me reprit. C'était une toute jeune fille au corps longiligne. Ses seins, effectivement petits, n'étaient pas cachés car la main de la jeune femme était placée sous eux, comme pour les souligner. J'avais réécrit l'œuvre mais n'en tint à ma version et me sentit blessée. Elle était nue et seule, cette fille et elle semblait perdue, frissonnant dans ce décor lacustre d'un beige dorée qui suggérait le froid...Curieusement, alors que j'avais vu des splendeurs, ce fut elle qui me resta. "Matin de septembre", c'était le titre du tableau. Je me promis de le revoir.

Le reste de la journée se passa en installation chez Phillip et en discussion. Un appartement était libre pour moi, si je voulais mais Vincent avait déjà appelé pour dire que m'héberger ne le dérangeait pas, d'autant que je restais peu de temps.

-Avoir un endroit à vous serait mieux, non?

-Oui, certainement...

-C'est de la timidité?

-Non...

-Je peux vous héberger certains soirs mais je vais être franc, pas tous.

-Je comprends.

-Vous comptez sur Vincent?

-Non...

-Si. Faites attention. Il charme beaucoup, les hommes comme les femmes. Et puis, il est à moi. Cela, vous le savez, n'est-ce pas? Il était loin de moi mais il m'est revenu.

-Bien, alors je vais accepter que votre mère me loge.

Il se renfrogna.

-Aucune obligation. Nous parlerons avec Vincent ce soir mais je vous aurais prévenu : faites attention. En attendant, sachez que ce soir, nous l'entendons avec son groupe au Birdland, dans la quarante-quatrième.

Il disait cela avec ironie, Hammer, et je voyais ses yeux briller. Il m'avait souvent jaugé et de nouveau, il le faisait.

 

29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Luxe et jazz à New York.

 

SHOTTTTTT

 

A New York, la jeune Isée commence d'excellentes vacances aurès de Phillip Hammer, son "ami" américain et Vincent, le compagnon de celui-ci. L'aisance matérielle et intellectuelle de son hôte la fascine...

J'étais chez lui et son intérieur était magnifique; c'était la demeure d'un bourgeois éclairé et cultivé. Boiseries, paravents, mélange de style, miroirs et vases d'orchidées fraîches. Tout y était réellement très beau et sachant que j'allais dormir là, je me sentais prête à accepter ses sourires comme ses regards en coin. Nous discutâmes un bon moment avant d'avaler un en-cas et de rendre sur les lieux où Vincent jouerait. Ce n'était pas très grand et il était visible que les gens qui étaient là n'avaient pas de fin de mois difficile. Dès que les musiciens apparurent, j'appréciais leur professionnalisme. Ils portaient tous des costumes noirs et des cravates blanches et étaient manifestement habitués à jouer dans ce type de salle. ils pratiquaient un jazz éclectique mais tout de même très contemporain, très éloigné de la légende qu'avait pu faire naître des gens comme Duke Ellington. Ils enchaînaient des morceaux tantôt gais tantôt mélancoliques qui privilégiaient les solos. Le saxophoniste, le trompettiste, le percussionniste et le guitariste avaient chacun l'occasion de se mettre en valeur et ils n'hésitaient pas à se surpasser dès que leur heure était venue. Peu habituée à écouter ce style de musique, je ne reconnaissais aucun des airs joués mais dans le public, certains se montraient enthousiastes. Il y avait des salves d'applaudissement. Manifestement, ils avaient tablé sur des musiques qui avaient fait leurs preuves tout y adjoignant des compositions personnelles qui étaient plutôt appréciées. J'adorai quand l'orchestre joua un de cet air qu'il avait créé, Delta Autumn, où le solo de trompette de Vincent me parut mélancolique mais très pur. Il m'évoqua un passage de Frankie Addams, de Carson Mac Culler, où la très jeune héroïne assise devant chez elle un soir entend un air semblable dont la tristesse voilée la renvoie à sa propre instabilité adolescente, comme si le trompettiste inconnu d'elle et probablement noir saisissait au vol son vague à l'âme. C'était un air très beau et très singulier et je me promis de l'évoquer avec son principal interprète. A priori, nous n'étions pas si nombreux à l'apprécier à sa juste valeur car d'autres airs furent bien plus applaudis, mais cela était sans importance. L'orchestre se produisit pendant deux heures environ, avec une coupure d'une vingtaine de minutes. Les gens aimaient beaucoup mais je fus dérangée par le fait que ni le bar ni le restaurant ne s'arrêtait de fonctionner, des commandes arrivant sur toutes les tables Pour moi, réduire la prestation de ce jeune orchestre à un dîner-spectacle était grandement dévalorisant mais quand, avec ma naïveté habituelle, je le dis à Hammer. Je vis celui-ci froncer les sourcils et hocher la tête d'un air désapprobateur.

-Ils doivent faire avec. La concurrence est énorme à New York. En trois ans, ils ont décroché des contrats dans plusieurs boites très connues et on parle d'eux dans les guides locaux et touristiques. Croyez-moi, ils ont un bon niveau et les critiques sur eux sont positives. Que les gens mangent des hamburgers pendant qu'ils jouent de la musique, s'interpellent et commandent à boire à voix haute n'entre pas en ligne de compte.

-Ah d'accord...

-C'est pareil à Paris, non?

-Je ne sais pas.

-Si.

Il m'avait commandé un burger- frites d'une taille invraisemblable pour moi et mordait, lui, dans un steak délicieux accompagné de salade. C'était son choix et il avait insisté pour la salade. Voilà un homme qui surveillait son poids comme son apparence, livrant ses cheveux à un très bon coiffeur et ses mains à une manucure. Il portait beau, ayant les moyens de ne pas s'habiller n'importe où et surtout pas n'importe comment car il mariait les styles, les matières et les couleurs ce qui chez lui était absolument réussi. Il avait troqué son costume de l'après-midi contre un autre, très bien coupé lui-aussi, qu'il portait avec une chemise bordeaux et une cravate grise. Il était superbe et, hautain, il en était conscient. J'étais loin d'avoir une aussi belle apparence mais je n'étais pas laide et j'étais svelte. Par contre, s'il commandait à chaque fois pour moi des plats délicieux mais très caloriques comme il le faisait, je risquais voir de voir ma mince silhouette s'épaissir...Il faudrait que je lui en parle...

 

29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. A New York avec Phillip et Zacharie.

FRANCOIS BARD 2

 

Invitée à New York par son "ami" Phillip Hammer, Isée partage beaucoup de temps avec lui et son jeune compagnon, Vincent. Ambiguités et non dits...

Pour l'heure, Vincent finit par nous rejoindre. Ses cheveux étaient bien lissés et sa mise élégante, très éloignée de celle du dandy bohème qui m'avait accueillie à l'aéroport. Il était souriant et pour la première fois devant moi en représentation devant Phillip. Car c'est bien de cela qu'il s'agissait. Il se tenait droit, parlait posément mais avait quelquefois des accents frondeurs qu'il s'empressait de modérer. L'autre le surveillait attentivement et ne lui aurait pas passé pas grand-chose s'il était sorti de son rôle de "jeune musicien jouant dans une boite à la mode et qui avait le succès modeste". Le beau trompettiste n'était à priori pas décidé à le faire et se montrait courtois avec moi et déférent avec son amant. Celui-ci le dominait. Lui le savait et l'acceptait. En société, cela produisait le plus bel effet mais je me demandai ce qu'il en serait quand nous serions chez Hammer. Je devais y dormir. Tant que nous serions tous les trois, rien n’apparaîtrait d'autre que cette docilité mais quand je serai dans la chambre d'ami et eux, dans celle de Phillip, il en irait peut-être tout autrement. Je me souvins de la frustration que j'avais éprouvée à Paris quand je n'avais pu assister aux exhibitions érotiques que Vincent réservait sur internet à son amant et je ressentis le même manquement. Ce qui les liait vraiment sur un plan érotique et plus largement sur un plan fantasmatique, continuerait de m'échapper.J'en étais là tandis que nous dînions ensemble et qu'ils me questionnaient l'un et l'autre sur mes premières impressions new-yorkaises. J'étais ravie bien sûr et je le restai tandis que Hammer nous emmenait chez lui. Je le fus moins ensuite, prise dans mes propres pièges. L'attirance passionnée que j'éprouvais pour le galeriste n'avait jamais faibli et de ce fait, j'étais astreinte au silence. Je pouvais, bien sûr, montrer à Vincent les histoires de femme que j'avais conjointement écrites avec son amant mais je ne pourrais en aucun cas, sous peine de mériter son mépris, lui avouer les échanges mensongers que j'avais eus avec lui sous le masque et lui confier ces aventures que j'avais eues sous contrôle. Elles me ridiculiseraient aux yeux d'un homme jeune et éprouvé par la vie qui ne verrait là que le spectacle d'une perversion gratuite. Non, je ne dirais rien et l'habileté de Hammer résidait dans cette capacité à me faire taire. Je pouvais le désirer et être amoureuse de lui, je pouvais désirer Vincent comme on peut le faire d'un bel objet, cela ne le dérangeait pas et m'aidait à vivre. Aurais-je franchi l'interdit des confidences, qu'au lieu d'être au seuil de leurs vies, j'en aurais été exclue. Sauf si, bien sûr, je préférais la fiction au réel. Pour Hammer, je l'avais fait avec succès, ce qui me valait ce voyage et ses privilèges. Pour Vincent, il me faudrait trouver un biais. Peut-être devrais-je lui apparaître comme très pure, semblable à la jeune adolescente nue du tableau, qui frisonne dans une aube grise et dorée, en septembre...En tout cas, je devrais ruser.

Vincent n'avait bu que de l'eau depuis le matin et peu mangé, aussi Phillip lui prépara t'il une assiette de viande froide et lui servit- il du champagne. J'en bus deux verres aussi et, la fatigue aidant, je me sentis grise. Je ne sais quand je gagnai la chambre d'ami. Je m'y douchai, mis des vêtements de nuit et rabattis la couette sous moi. Je dormis et je rêvai. Phillip et Vincent me réveillaient car leurs ébats étaient violents. J'allais écouter à leur porte et entendait les geignements significatifs de l'amour physique. Je m'en repaissais. Ils savaient que les écoutais et faisaient plus de bruit encore, comme pour me blesser. En dernier lieu, je rêvai que, mécontent de la familiarité que Vincent me manifestait, son amant le fessait sévèrement en multipliant les insultes verbales. Mais au réveil, bien sûr, bien que très marquée par ces rêves, je n'en dis rien. Vincent dormait encore et Phillip avait des achats à faire avant d'aller ouvrir sa galerie. Ce jour-là, il la gérait seul.

 

29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Vincent se confie (1)

DE BASHER HOCKNEY

Isée, invitée à New York, visite la ville et parle avec Vincent, le beau trompettiste qui est le compagnon de son hôte, Phillip. Vérité et fiction

Pour ma part, je tenais à prendre un bus touristique pour faire le tour de Manhattan et pouvais le faire seule. Vincent se proposait de m'emmener au cinéma et de dîner avec moi avant que je me transfère chez la mère de Phillip où, indépendante, je pourrais prendre mes aises. Ce plan me convenait fort bien et du reste, tout se déroula comme convenu jusqu'au cinéma où je laissais le jeune trompettiste choisir le film. Il m'entraîna dans un petit cinéma où l'on projetait Les Amants du Pont-neuf, film déjà ancien où Juliette Binoche jouait une jeune SDF aveugle tandis que Denis Lavant, l'homme qui l'aimait dans le film, faisait tout pour elle. Voilà un film que j'avais à Paris sur une petite télévision et qui ne m'avait pas laissé un souvenir mémorable. Le voir doublé en anglais ne m'amusa pas beaucoup mais Vincent était assis à côté de moi et je ne pouvais que me repaître de sa belle présence lunaire. Lui, il aimait ce film et je m'obligeai donc à en chercher les beautés. A la fin de la projection, nous prîmes un de ces invraisemblables cafés longs qui fait l'ordinaire américain et je m'efforçai de trouver le film bon. Il s'en amusa car je me forçai mais dit-il il préférait avoir vu avec moi un film de ce genre plutôt qu'un blockbuster. il me fit rire. Le magnifique visage de Juliette Binoche nous hanta un moment tous les deux puis je lui racontai tous les endroits que j'avais vus du bus et hors du bus avant d'aller grignoter des tacos avec lui. Cette fois, c'est moi qui avais indiqué mes gouts et ils n'étaient pas très français...Bon prince, il les prenait tels quels. L'atmosphère de l'endroit était telle que je me représentais un restaurant latino moyen de gamme dans une grande ville étasunienne. Tout le monde galopait et s'interpellait en espagnol et en américain. Ceci dit, la nourriture était bonne. Je la dégustai avec joie tandis que, comme à son habitude semblait-il, Vincent la picorait. Ce soir-là, il était un peu distant mais il le fut moins quand il m'eût emmené à bon port. Je sursautai en entrant dans l'appartement que me prêtait la mère de Phillip Hammer. Le trompettiste, qui portait mon sac de voyage et mon bagage cabine, se mit à rire.

-Un choc?

-Non, c'est jusque...

-Les tapisseries et le mobilier sont affreux. C'était un pied à terre pour madame Hammer quand elle voyageait et venait encore à New York. Elle n'est pas si âgée mais elle ne vient plus. C'est une femme très mélancolique. Ses idées en matière de décoration n'étaient ni très originales ni très favorables à l'apaisement mental. Tout le monde n'aime pas le jaune et l’orange comme elle...

-C'est sûr !

-Elle l'a loué un temps sans rien y changer et maintenant qu'il reste vide, l'idée qu'il ait besoin d'être rafraîchi ne l'effleure pas.

L'appartement disposait d'une cuisine moderne et fonctionnelle, d'un living meublé de façon conventionnelle et de deux chambres dont l'une avait une salle d'eau. Rien n'était ni mal construit ni mal disposé mais tout était pesant, des couleurs des murs à celle des canapés et des fauteuils, sans parler de celles des tableaux abstraits ornant les murs. Je haïssais mais que pouvais-je dire ? Non seulement je recevais un billet aller et retour pour New York en cadeau mais j'étais encore invitée à dîner et j'étais logée. Difficile de se plaindre.

Vincent, conscient de la laideur des lieux, n'en rajouta pas et moi-même me mordit la langue. Assis sur un immense canapé orange foncé, il m'interrogea.

-Phillip m'a dit qu'ensemble vous aviez écrit des histoires, c'est vrai?

-Oui, c'était une des conditions posées pour que je lui donne des cours de français différents.

-Ces textes sont lisibles? Je peux les voir?

-Bien sûr.

Je lui donnai les versions imprimées que j'avais avec moi et attendis. Il fut concis.

-Ruth est horrible.

-Vraiment?

-Elle est frigide.

-Pas de sens du devoir?

-Si, elle ne ressent rien donc, elle l'a.

-Rien de positif sur elle?

-Non.

 

Il n'aimait pas non plus Louise et "ses fantasmes pro-Kennedy" qui lui semblaient trop calculés. Sa vie était déjà trop avancée pour attendre d'elle la moindre évolution positive. Il ne croyait pas qu'elle avait trouvé une sorte d'harmonie. Seule Carolyn lui plaisait. Je cherchai à savoir pourquoi.

-Elle est jeune et déjà marquée?

-Beaucoup de jeunes femmes le sont à son âge et même avant.

-Alors, c'est le onze septembre.

-Oui, ça peut expliquer qu'elle soit si perdue. Son mari ne revient pas non car il a eu un accident de la route mais parce que des terroristes ont détruit la tour dans laquelle il travaillait, tuant par là-même des centaines et des centaines de personnes...

-Votre explication est très extérieure.

-Vous voulez quoi? Que je m'implique pour elle?

-Oui.

-C'est une jolie fille qui aimait son mari. Elle ne sait même pas comment il est mort dans la tour. Elle met du temps pour se reconstruire mais elle y arrive et je suis content pour elle. Trois ans pour se détacher vraiment de cet autre qui est mort, c'est le temps qu'il lui a fallu. Après, elle est plus forte. Moi, je...

Il avait l'air ému et je saisis ma chance.

-Votre mère est morte le 11 septembre?

-Oui mais elle n'était dans aucune des tours. Elle est morte des suites d'un cancer généralisé, dans un hôpital d'une petite ville de l'état de New York. Il n'y avait plus rien à faire : on l'avait débranchée.

 

 

Publicité
Publicité
29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Vincent se confie (2)

LITHOGRAHIE HOCKNEY

Invitée par Phillip Hammer, Isée est à New York. Vincent, le jeune compagnon de Phillip, se confie à elle

-Vous vous souvenez?

-Des attentats? De sa mort? Oui, des deux. J'avais treize ans. On me demandait de participer à un deuil national alors que le mien était tout ce qu'il y a de plus personnel. De gré ou de force, j'ai participé aux deux et puis, tout a changé.

-Vous êtes resté avec votre père?

-Oui, mais pas très longtemps. J'étais un élève compliqué, bon parfois. Avec ma mère, on parlait en français. Elle était vraiment jolie et toute blonde. Elle s'appelait France. Elle m'apprenait beaucoup de mots, les verbes, les phrases. Elle était arrivée à vingt ans aux USA mais le rêve américain n'a pas été pour elle. A trente-trois ans, elle est partie. Je n'aimais pas tellement mon père quand elle était vivante mais quand elle est morte, ça a été pire. Je lui ai échappé assez vite.

-Comment cela?

-J'ai fugué quand j'avais quinze ans. Vivre avec lui ne présentait aucun intérêt. On m'a retrouvé et j'ai recommencé, alors je suis allé dans un internat spécialisé. Il y avait des éducateurs. Ce n'était pas très bien surveillé. Je ne savais rien de la sexualité ou presque à mon arrivée mais bien plus au bout de quelques mois. Il n'y avait que des garçons. Je crois que c'est clair.

-Oui, très. Vous avez eu un diplôme?

-Dans cette école, non. A dix-sept, dix-huit ans, j'étais déjà à New York et je me débrouillais comme quelqu'un de cet âge assez jeune et assez beau peut arriver à le faire. J'aimais bien l'alcool et les pilules de toutes les couleurs et je pouvais en acheter.

-Et vous avez rencontré Phillip?

-Ah non pas tout de suite. J'ai rencontré tout un tas de types qui avaient la quarantaine, toujours pour le même motif. ça me permettait d'avoir de l'argent. Un de ces types, un jour, s'est révélé autre. C'était un musicien, un trompettiste. Quand je l'ai entendu jouer, j'ai eu comme un déclic. Je voulais pouvoir faire cela. Il m'a poussé à mettre de l'argent de côté et à me former. Petit à petit, je suis devenu un bon instrumentiste et vous voyez, j'ai fait tout ce qu'il faut pour devenir encore meilleur.

-Vous êtes parti de loin et vous pouvez remercier cet homme. Quel était son nom?

-Andy.

-Vous lui avez dit que maintenant vous êtes musicien professionnel?

-Non. Je l'ai perdu de vue. Je l'ai cherché à un moment sans le trouver. Il n'allait pas toujours très bien. Je pense qu'il est mort.

-Et Phillip?

-Je l'ai connu plus tard.

-Il a dû vous rassurer. Il est très stable.

Il eut un rire un peu faux, presque douloureux.

-Je jouais déjà dans un orchestre, mais pas celui-là. J'avais envie d'un type mature pour un soir. Internet, je n'aime pas trop et sur les sites, les types viennent de n'importe où. J'ai utilisé un système de réseaux téléphoniques. On est très vite en rapport avec beaucoup d'hommes et on essaie de faire le tri tout en sachant que c'est possible car géographiquement, ils sont dans le périmètre. Lui, j'aimais sa voix et puis je trouvais qu'il était clair dans ses demandes. Je l'ai fait venir chez moi. J'étais à Brooklyn à l'époque et il a fait le trajet sans sourciller. On a baisé tout de suite et on a adoré ça, lui comme moi. On s'est revus deux ou trois fois pour les mêmes raisons puis notre relation a pris un autre tour.

J'étais suffoquée. Au moins, il était direct.

-Qu'est ce qui a changé?

-Il est très strict, comme vous savez. Le cirque avec les mecs, j'ai arrêté et avec les femmes mûres aussi. Je ne suis pas un ange mais globalement je suis sage et surtout je vis pour la musique.

Je m'efforçai de rester neutre tout en recevant de ce presque inconnu de lourdes confidences. Je me faisais petite et naïve comme la fille nue du tableau en escomptant obtenir un plus grand dévoilement.

-Donc vous avez une bonne relation avec lui?

Ma question n'obtint pas le résultat escompté. Il devint frondeur.

-Elle est compliquée mais vous n'avez pas à savoir jusqu'à quel point et de toute façon, vous, c'est Zacharie qui vous motive...

-Bien sûr.

-Bien sûr? Alors, travaillez l'idée d'aller dans le Montana.

Il partit et je me sentis mal mais le lendemain, calculant le décalage horaire, j'appelai Zacharie et lui racontai New York. Il fut chaleureux et enthousiaste et me dit de nouveau qu’il m'attendait. Dans la même journée, j'eus un appel de mes parents car Noël approchait et que passais toujours cette fête avec eux. Ils me congratulèrent pour les photos que je leur envoyais de mon voyage et m'annoncèrent que, se sentant vieillir, ils avaient décidé de me faire une avance sur héritage. Ils me rendaient propriétaire du studio aux Invalides et me faisaient don, en complément, d'une bonne somme d'argent. Le bonheur que j'éprouvais suite à ces deux appels fut sans partage. Rien ne me faisait plus peur.

29 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3.

ny HIVERRRRRRRRRR

 

3. Fêtes.

Invitée à New York par son ancien élève Phillip Hammer, Isée, jeune enseignante, passe des fêtes de fin d'année inattendues et ambigues.

Je ne m’étendrai pas sur la fête de Noël où, à la veillée, j'allais avec Phillip à la cathédrale Saint-Patrick suivre un office catholique qui le concernait peu puisqu'il était de souche protestante mais me renvoyait à la piété de mes parents, lorsque j'étais petite. Nous nous retrouvâmes chez lui tous les trois pour un de ces jolis dîners que savait lui concocter son employée de maison mexicaine, Juana. Je me posai pas la moindre question sur le fait que nous passions là une veillée très inattendue et me sentit sereine. Le lendemain, loin du bel appartement de Hammer et des décorations raffinées qu'il avait placées çà et là pour évoquer cette fête de la Nativité, il m'emmena chez une de ses sœurs qui vivait à une heure de New York dans une banlieue huppée où elle l'invitait à l'occasion de certaines fêtes. Je fis connaissance du mari de celle-ci, un avocat de renom et rencontrai sa mère qui était arrivée de Boston l'avant-veille. Elle avait effectivement un air très mélancolique. Son père n'était pas là, le couple ayant divorcé sur le tard. Tout dans cette maison respirait l'opulence et Joanna (c'était le nom de cette sœur) veillait avec fierté sur ses quatre fils dont deux étudiaient déjà dans des universités de l'Ivy league tandis que les deux autres (elle n'avait enfanté que des garçons) fréquentaient les meilleurs internats privés. Le dernier -né avait douze ans. Voilà une femme et une mère qui ne laissait rien au hasard. Liz, la plus jeune sœur de Phillip était mariée à un diplomate en poste en Australie depuis peu. Le couple se voyait contraint et forcé de ne pas rejoindre New York cette année-là et s'en voyait navré. Peut-être me serais-je mieux senti s'ils avaient été là car, sur les photos du moins, ils paraissaient plus détendus et sympathiques que ce couple Davidson que je vouais rapidement aux gémonies. Je m'ennuyai ferme et me contentai de jouer mon rôle de gentille française en vacances aux États-Unis et Vincent fit de même à la différence qu'il était victime d'un léger ostracisme dû à son origine sociale et à son orientation sexuelle. Phillip avait la même mais il avait de l'argent et une parole forte. Le contrer revenait à se voir infligé des remarques cinglantes. La journée passa malgré tout et je me dis qu'au moins, je savais ce qu'était une fête de Noël en Amérique chez des gens qui ne manquaient de rien ! Je savais aussi quel poids de stéréotypes les Américains véhiculaient sur les Français ! J'eus droit à la baguette, aux crêpes, à "Je suis Charlie" et au jeune président Macron qui redorait l'image d'un beau pays en proie aux attentats terroristes ! Je répondis je crois à peu près à toutes les questions qu'on me posait et quand nous prîmes congé, dans la voiture de Phillip, je me tins coite. Je regardais la nuque blonde de Vincent et me demandai comment il pouvait se débrouiller d'un pareil univers. Seule dans l'appartement de madame Hammer (j'avais dû la remercier au passage pour son hospitalité), j'écoutais tout le rock violent dont je disposais. Phillip avait mis toutes sortes de cd et de dvd à ma disposition. C'était le moment de se passer les nerfs.

Quand allai-je voir un opéra de Mozart au Metropolitan opera avec Hammer ? Peu de temps après le vingt-cinq décembre. Tout le monde était très habillé. Nous avions de bonnes places et il m'avait offert une tenue. C'était une robe noire qui tombait aux genoux et dont le haut, transparent, était incrusté de perles.

Quand allai-je réentendre Vincent dans les boites où il jouait, seule puis avec Phillip (ou l'inverse) ?

Quand fis-je du patin à glaces au Rockefeller center avec le beau trompettiste? J'étais maladroite et il était aérien.

Quand fis-je seule l'ascension de l'Empire state building et rit en voyant ma photo mise en vente (comme celle de temps d'autres) à la descente?

Quand allais-je faire une excursion en bateau avec Hammer et Vincent pour m'approcher d'Ellis Island et de la statue de la liberté?

Quand fut-il décidé que dormir dans l'appartement de madame Hammer ne me convenait pas et qu'au bout du compte, passer quelques nuits chez Vincent ne me ferait pas de mal?

Quand dînai-je avec eux près de Times Square et me sentis-je prisonnière d'eux ? Je devinai alors que rien ne pourrait bien se terminer. Hammer était ambivalent, m'interdisant Vincent tout en me faisant comprendre l'inanité de mon attirance pour Zacharie. Et Vincent, tout en s'affichant interdit, me provoquait...

25 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Sortir avec Vincent à New York.

TORSE NU

Invitée à New York par Phillip Hammer, l'homme à qui elle a donné des cours de français à Paris, Ysée est attirée par Vincent, le jeune compagnon de son hôte. Sans que le jeune homme le sache, elle lui a joué un tout étrange. Fascinée par lui, Ysée manque de distance et demande au jeune musicien de la conduire dans une boîte gay.

Quand demandai-je au trompettiste de m'emmener danser ? Il ne se le fit pas dire deux fois et m'emmena dans la dixième avenue au Marquee où tout le monde dansait jusqu'à l'aube. Même en semaine, il y avait plein de monde. Il était très à l'aise, blond, mince et beau comme il était et après avoir longtemps dansé avec lui, je le perdis de vue. Je le retrouvai avec une brune canon qui riait beaucoup avec lui. Il me la présenta. Elle s'appelait Kate et était soliste dans un groupe de rock qui, lui-aussi, se produisait dans des boites à la mode, mais pas les mêmes.

-Kate et moi nous connaissons depuis pas mal de temps. On s'était un peu perdus de vue mais on se retrouve ce soir avec plaisir !

C'était le moins qu'on puisse dire. Ils venaient de s'embrasser et s'apprêtaient à recommencer. Je me maudis de ne pas avoir le joli visage mutin de Kate, sa silhouette mince et gracieuse et je m'en voulus aussi de ne pas porter comme elle une jupe très courte et un bustier pailleté. Elle portait de longues boucles d'oreille très voyantes et des talons hauts qui me laissaient confiante dans l'équilibre qu'elle savait garder. Avec cela, elle était fraîche. Je bouillais intérieurement. Ils n'avaient vraiment pas l'air d'être restés longtemps sans se voir et encore moins de s'être brouillés. D'où sortait la phrase de Phillip sur le fait que cette fille en avait eu assez du jeune musicien puisqu'il ne voyait que par son amant? Cette fois-là, j'eus vraiment le sentiment de terminer la soirée seule...

Quand demandai-je à aller dans un bar gay? Phillip déclina immédiatement ma proposition mais Vincent releva le défi. Il me conduisit au Boxer, dans la trente septième. Il était déjà une heure du matin. Vêtu de noir, il portait un bracelet de force à son poignet droit. Il était très attirant, à la fois timide (il baissait un peu la tête et ne regardait pas dans les yeux) et provoquant (son jean et t-shirt noir étaient moulants et il portait son blouson de cuir comme un uniforme). Il connaissait pas mal de monde ici et on lui touchait facilement l'épaule ou le bras. Oui, il était chez lui, qu'il prît un verre, qu'il dansât ou qu'il discutât. Le voir danser avec d'autres hommes provoqua en moi une joie intense et de l'excitation. Je restai pourtant sagement à ma place car si personne ne me disait rien, c'est parce qu'il y avait mis les formes en me présentant comme une amie Française qu'il accueillait et ne voulait pas laisser seule ce soir-là. Je le regardai donc évoluer et quand quelqu'un l'embrassa, je ne baissai pas les yeux. Lui, de toute façon, rayonnait et discrètement, je crois, s'amusait de moi. Quand avais-je vu des barmen torses nus, jeunes et aussi sexy ? Et quand avais-je côtoyé ceux qui venaient ici : les couples déjà formés et les célibataires en quête de bonne fortune, tous très séduisants et très à la mode? J'étais naïve quand je croyais découvrir un univers différent du mien où je me sentirais bien car celui-ci existait depuis longtemps et personne ne m'y avait attendu...A sa manière pleine de charme, il me le faisait comprendre...

 

25 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Un cadeau et un piège.

IL LIT

 

Invitée à New York par l'Américain Phillip Hammer, Isée, jeune enseignante, est troublée par Vincent, le beau trompettiste que son hôte a pour compagnon. Mais compte-tenu du passé, lui faire des avances ne va pas sans risque...

Les expériences se succédaient et lentement mais sûrement je me mettais dans la posture de celle que j'avais été: la faussaire qui s'était fait passer pour l'être aimé afin de le séduire. Vincent, je l'observais de jour comme de nuit, surtout de nuit. Je me réveillais alors qu'il dormait profondément et j'allais le contempler. Il n'était pas frileux et repoussait souvent sa couette. Je pouvais donc contempler son visage que le sommeil avait détendu et son torse qu'un simple t-shirt blanc moulait étroitement. Il avait de très longs cils blonds, des pommettes hautes et une jolie bouche à la fois gourmande et enfantine. Il avait embrassé Kate, cette jolie fille, dans la boite ù ils s'étaient retrouvés. A l'évidence, la liaison qu'il avait avec elle était bien vivante. Il s'était laissé enlacer par un certain John dans une autre boite, l'avait embrassé lui-aussi mais avait refusé d'aller plus loin. Il s'était écarté en riant. Ces gens-là ne le voyaient pas comme moi je le voyais. Là, il m'appartenait. Je le volais à Hammer. Il était mien. Je n'osais tendre la main pour effleurer sa joue mais je restai là un long moment et chaque matin, je me sentais plus proche de lui. Il n'aimait guère les portraits de femme que je lui avais fait lire mais il aimerait les textes poétiques que j'écrirais sur ce qu'il était: lui en musicien, lui en patineur, lui en amoureux de la vie déambulant tranquillement dans une des rues de son quartier, lui buvant un verre dans un café avant de rentrer chez lui écrire des chansons. J'écrivais et encore et je chantonnais Delta Autumm ainsi qu'un air qu'il avait joué seul pour moi, Black Pearl, un air plus joyeux que le précédent. Toujours dotée de ma grande naïveté, je recopiai mes textes sur de très beaux papiers, les fis relier et les lui donnai. Ce n'était que des instantanés mais ils étaient pour lui. J'espèrais qu'il les trouverait beaux. Ce cadeau le surprit, il prit son temps pour lire mes textes, assis chez lui sur son grand canapé démodé tandis que, assise sur son lit, j'attendais son verdict.

-C'est très joli.

-Alors, ça vous plaît !

-Oui, mais ce n'est pas moi.

-Bien sûr que si ! Ce sont des instantanés de vous.

Il parut ennuyé.

-Isée, je vous reçois ici par simple sympathie.

-Oui, bien sûr. Je sais.

-Alors, vous savez aussi que je suis ambigu, que j'aime séduire et jouer avec les autres. Allez, vous avez compris cela !

-Alors qu'y a t'il de mal ? Je suis sensible à ce que vous êtes et j'ai envie que vous m'embrassiez...

-Phillip a lu ses textes?

-Ils sont pour vous.

Il soupira de nouveau mais ne poursuivit pas la conversation. Il posa sur une étagère le beau recueil et ce fut tout.



25 avril 2023

ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 3. Double jeu.

 

BELLE IMAGE

 

Parce qu'elle a joué double jeu avec lui, Isée, jeune Française en vacances à New York, à l'instagation de Phillip Hammer, l'américain à qui elle a donné des cours. Il est lié à ce Vincent qu'elle aimerait séduire, Le beau trompettiste l'attire. La situation est trouble mais Isée, voulant tout savoir de lui, fouille dans ses affaires

On approchait du 31 décembre et je m'en réjouissais. Phillip invita pour la veillée une douzaine d'amis dont tous n'étaient pas gay. Juana avait fait des merveilles culinaires et on fit autour d'une belle table aux ornements blancs un délicieux repas avant de partir pour Times Square où le compte à rebours était commencé. L'associée de Phillip était là avec son mari ainsi qu'un ami de jeunesse heureusement marié à la même femme depuis longtemps. Deux couples gay complétaient la bande et il avait invité une femme d'une cinquantaine d'années, une journaliste avec laquelle il était ami. Je ne doutais pas qu'il l'eut fait par souci de moi, de façon à ce que je ne sois pas la seule à ne pas être accompagnée. Pendant le dîner, il eut pour Vincent des gestes tendres qui m'irritèrent et il en eut de nouveau au milieu de la foule alors qu'approchait le minuit fatidique. Dans son appartement, il avait caressé la joue de son compagnon, lui avait tenu la main et maintenant il avait passé la main autour de son épaule. Un délire s'emparait de moi et je pouvais le contrôler. Ce n'était pas à lui de faire cela, c'était à moi à cause de tous ces messages échangés et de tous ces mots d'amour que Vincent m'avait dit, même s'il croyait parler à son amant et ne savait pas que c'était moi. J'étais outrée mais bien sûr j'affichai un grand sourire et sautai de joie quand, l'heure de minuit s'affichant sur les écrans géants de Times square, tout le monde se mit à hurler et à se congratuler. Hammer, cette fois très chaleureux, me souhaita une bonne entrée dans l'année nouvelle et Vincent aussi mais je le sentis sur ses gardes. Nous formions cependant une bande joyeuse et il nous restait à boire un verre puis un autre pour prolonger la soirée. Cela dura jusqu'à trois heures du matin, encore qu'à cette heure-là, nous n'étions plus que quatre, la belle journaliste et l'associée de Phillip ayant déclaré forfait. Nous rentrâmes en taxi et je restai avec eux deux. Notre réveil fut tardif et je fus surprise d'apprendre que l'après-midi ils avaient un rendez-vous auquel ils ne pouvaient me convier. Je restai donc chez Hammer et écoutai de la musique avant de regarder un film. Un premier janvier calme...après tout...

Je m'inquiétai un peu le soir car ils ne rentraient ni l'un ni l'autre et dus attendre longtemps un texto m'informant qu'ils seraient en dehors de New York jusqu'au lendemain. Le deux janvier au matin, la maison étant toujours vide, je me rendis chez Vincent où je ne trouvai personne non plus. Comme je le faisais souvent, je fouillai discrètement dans ses affaires. Il était précautionneux car je n'y trouvai jamais grand indice de ses liaisons parallèles. Restait son ordinateur mais il y avait un mot de passe. Cela me frustrait. J'aurais tant voulu savoir à qui il écrivait et quoi, ce qu'il écoutait comme musique, ce qu'il regardait comme films, sur quels sites gay il allait et s'il correspondait avec Kate mais je n'avais pas les connaissances requises pour contourner ce verrouillage malheureusement.

CAFE DORA

Je restai frustrée dans mes recherches et au moment où j'allais les abandonner, je me rendis compte que le beau recueil que j'avais offert au tendre trompettiste n'était plus là. L'aurait-il emporté avec lui? Si c'était le cas, je ne pouvais que m'en féliciter. Cela signifiait que les mots que j'avais employés commençaient à atteindre leur but et que ce jeune homme auquel je m'adressais se laissait toucher par moi...Si c'était le cas, je devais chercher encore. Galvanisée, je fouillais encore et finis par trouver un carnet de notes emplis de petits textes et de dessins. Je m'empressai de les lire. Il s'agissait en fait de récits courts sur les aventures rapides qu'il avait. Il y avait de brèves description des hommes rencontrées, des mensurations et des remarques très crues sur la qualité des rapports sexuels qu'il avait eus avec ces types. Phillip n'apparaissait nulle part alors que les numéros de téléphone s'alignaient. Ce jeune homme, qui aux dire de l'Américain, s'était beaucoup calmé et était devenu sage, m'avait bien l'air d'être insatiable et d'avoir le diable au corps. Encore que...A y bien regarder, les dates qui se succédaient étaient un peu anciennes et les derniers commentaires remontaient à un an et demi. Ceci, selon moi, ne présumait de rien. A ce que j'avais pu voir quand nous étions allés en boite, il avait l'air très libre. A coup sûr, il avait des aventures fréquentes. Hammer se trompait. Cette découverte que je fis me rendit plus forte. J'avais écrit à ce bel être de jolis textes poétiques. Il ne m'aimait pas mais il m'aimait bien. Il n'était pas farouche. Avec lui, j'irais plus loin.

 

Publicité
Publicité
1 2 3 > >>
LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
Publicité
Archives
Publicité