Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
27 mai 2024

Battles. Partie 1. Rééducation et maltraitance. La force de la prison Etoile.

 

5. Prison Etoile. Intimider et maltraiter celui qui résistait.

La rééducation de Paul, qui résista à la dictature sous le pseudonyme de Battles, a commencé. Elle est supervisée par l'instructeur Winger, qui connait son affaire

Traumatisé par les coups reçus, celui-ci résista comme il put. Plusieurs jours durant, il subit l'isolement. C'était effrayant. La lumière était aveuglante. Xest apparaissait chaque jour et l'observait. Elle prenait des photos. La porte, quand elle se refermait, faisait un bruit horrible.

Quand Paul revint à la vie normale, il alterna travail et étude mais ne vit pas Winger. Cependant, on lui fit encore des intraveineuses et on le battit encore. L'agent Xest faisait venir d'autres gardiens, le menottait et observait la scène. Quand blessé et humilié, il restait face à elle, elle trouvait plaisant de le frapper au visage en lui donnant de petits noms de femme et elle se moquait de sa crainte de la fouille au corps.

-Tu verras, tu vas y prendre goût !

Au bout de dix jours il se sentit vaciller et au bout de quinze, il céda, les mauvais traitements ayant raison de lui. Comment pouvait-il résister ? A plusieurs reprises, il fut conduit chez l'instructeur Winger qui se contenta de l'observer. Assis sur une chaise, il était menotté.

-Hum, tu changes ? Es-tu encore Battles ?

Paul, éperdu, ne pouvait plus parler.

-Non, tu vois, ce n'est plus toi...

Il se promenait dans son bureau à pas lents, sa cravache à la main et observait sa victime avec cruauté et amusement.

-Tu vas recouvrer la parole, détenu. Nous savons bien que tu as des choses à nous dire...Maintenant que tu ne trouves plus déplacé de te montrer nu à ta gardienne et que tu restes nu devant nos médecins quand ils t'examinent, ta vie est différente...

Elle le devint plus encore quand Winger le fit rester immobile et debout près d'une heure dans son bureau. D'abord vêtu, il dut retirer ses vêtements et garder ses mains derrière la tête. L'instructeur fixait sa montre et attendait. Son regard se posait sur le corps de Paul et il guettait le moindre signe de faiblesse. Il était prêt à frapper. Quand l'heure se terminait, il se plaçait devant Paul qui se rhabillait. Quelquefois, il arrêtait ses gestes du bout de sa cravache.

-Nu de nouveau. Reprends ta position. Trente minutes.

 Les derniers temps, cet exercice qui tenait de la torture devint très difficile. A chaque seconde, Winger lui faisait comprendre qu'il n'était rien. Lors de la dernière séance, Paul flancha au bout d'une heure.

-Position réglementaire.

Il avait froid, il avait une crampe. Il tenta en vain de se reprendre puis gémit et tomba à genoux. L'instructeur leva sa cravache et Paul hurla. Aucun coup ne vint. Winger alla s'asseoir.

-Reste à genoux. Trente minutes, comme convenu.

Paul fit ce qu'il put.

-Rhabille-toi. Xest te ramène.

Winger souriait.

Puis, de nouveau, ils ne se virent plus.

Au fil des semaines, Paul changea. Ces mêmes médicaments qui l'avaient abruti semblèrent soudain le galvaniser. Il lui bientôt difficile de s'en passer et lui, qui s'était opposé plusieurs fois à ce type de manipulation, en vint à ne plus opposer de résistance. Son cerveau était brouillé et même son corps était en demande.

Publicité
Publicité
27 mai 2024

Battles. Partie 1. Rééducation phase 1. Winger tisse sa toile.

 

Sa mémoire qui avait été mise à mal lui revint et il apprit sans difficulté les textes de Dormann.  De la même façon, il ingurgita ceux des chantres du régime et ne fut plus pris en défaut. Devenu efficace, il savait résumer tout texte politique émanant du pouvoir en place. Et il commençait à rédiger des confessions que l'inflexible Winger exigeait de lui. Il devait se décrire enfant, adolescent, jeune homme puis homme fait et ceci sous divers angles et le rigide formateur l'interrogeait impitoyablement sur ce qu'il avait écrit. Cette tâche lui était encore difficile mais l'instructeur se montrait pédagogue.

-Tu es toujours en phase 1, détenu mais tu as beaucoup changé. Tu mémorises et récites bien, c'est parfait. Revenir sur toi-même est un processus difficile mais sache que je veille sur toi. Je l'ai toujours fait !

-Oui, Instructeur.

-Tu es sincère ? Il y a eu des passages difficiles...

Paul avait peur.

-Parle. Tu n'oses pas peut-être...parler.

-Non, instructeur.

-Tu ne devrais pas. Je sais ce qui est bon pour toi. Tu comprends ?

-Oui, Instructeur.

-Non, pas encore... Mais c'est vrai.

Le temps continuant de s'écouler, Paul était devenu très performant à l'atelier où, ne commettant pas la moindre faute, il était rapide. On signalait aussi sa politesse.  On le changea de travail cependant et lui demanda de faire de la manutention. Il était assis, ce qui était moins fatigant, mais il côtoyait cette fois des droits communs qui avaient le droit de parler entre eux. Lui ne devait s'exprimer sous aucun prétexte. On attendait qu'il le fasse, bien sûr, mais il ne céderait pas !

L'instructeur Winger était incontournable et Paul qui l'avait détesté lors de leurs premières rencontres, attendait désormais leurs entretiens avec impatience. Hiératique, jeune et beau, ce rééducateur ne savait-il pas tout ?

-Tu as bien intégré les notions que nous t'avons inculquées, Paul. Tu fournis un travail impeccable. Xest ne se plaint plus jamais de toi et tu ne fréquentes plus guère l'hôpital...

-Je fais mon possible, Instructeur.

-Moi, j'en suis certain ! J'ai des éloges à te faire !

-Merci, Instructeur.

-De rien. Maintenant tu as les idées plus claires !

-Bien plus claires, Instructeur.

-Tu vois ! Je ne te bats même plus !

Pourtant, vint un moment où il dormit si mal qu'on dut l'hospitaliser quelques jours. Il ignorait bien sûr que les puissantes drogues qu'on lui administrait avait des effets pervers et que, parfois, on suspendait son traitement. On lui faisait tant de piqûres pour le maintenir en bonne santé qu'il en perdait son sens commun. Fiévreux, il délira. Quand il s'éveilla dans une chambre tendue de blanc, le bel instructeur était penché vers lui. Paul, qui flottait entre rêve et réveil se surprit à dire :

-Je suis si désolé...

-Mais de quoi ?

-Vous vouliez que je donne des noms mais c'est ma mémoire qui se dérobe tellement !

-Ah, les noms de ceux qui écoutaient tes absurdités ? Tu viens de le faire, tu as parlé dans ton sommeil. Nous avons pu faire les recoupements nécessaires, ne t'inquiète pas pour ça.

-J'ai parlé...

-Mais oui, Paul...Je te l'ai dit : ne t'inquiète pas. Ce que nous voulions savoir, nous l'avons su...

-Je ne suis pas certain, Instructeur...

-De quoi ? S'il manque des noms, tu compléteras la liste, voyons. Tu as fort bien fait. La délation est une vertu.

-Je ne suis pas un traître.

-Absolument pas : tu as fait ton devoir ! On va arrêter qui doit l'être et on réglera nos comptes. Rien de plus.

-Oui, Instructeur.

-A bas la vermine !

-Oui, Instructeur.

-Vous m'appelez toujours par mon prénom, désormais...

-Mais c'est naturel.

L'instructeur souriait légèrement.

-Et c'est la procédure. Tu comprends ?

-Non, Instructeur.

-Ici, la plupart des détenus ne sont plus personne. Ils sont habitués à n'être que des numéros ; ils sont interchangeables. L'un d'eux meurt : on prend ses vêtements de prisonnier et on les attribue à un entrant. Toi, c'est différent. Il n'est nul besoin de t'aider à oublier ton identité. Elle reste identique mais tout en toi est transformé.

-Oui, Instructeur.

-Tu es là pour nous servir...

27 mai 2024

Battles. Partie 1. Prison Etoile. Rééducation phase 2. Paul tourmenté.

 

Paul sortit de l’hôpital et retrouva ces rendez-vous réguliers. Winger, moins hiératique, s'asseyait désormais face à lui. Son regard était moins dur. Grâce aux étranges confidences de Paul, des arrestations avaient été opérées. On avait fusillé. Mais Winger n'en avait parlé qu'une fois, comme d'événements subalternes et Paul, dont l’esprit était parfois très embrouillé, n’était pas sûr d’avoir bien compris. Demander des éclaircissements pouvait avoir des conséquences funestes, aussi s’en garda -t’il bien. De toute façon, l’instructeur était passé à autre chose.

-Paul, je songeais à tes années de formation. Enfant et jeune homme, tu avais de la liberté une bien étrange notion...

-En un sens, oui, Instructeur.

-Une conception fantasque et égoïste, nous sommes d'accord.

Paul hésitait mais le bel instructeur avait barre sur lui et quoi qu'il en dise, il le terrorisait...

-Quelle est ta réponse ?

-C'est assez vrai, Instructeur.

-Bien. Tu comprends donc que dès l'abord, tu risquais de te fourvoyer...

-C'est à dire, Instructeur.

-C'est un fait. Voyons Paul !

-J'ai pourtant été un bon journaliste des années durant, quand ce pays avait d'autres dirigeants...

-Ah mais certainement ! Cependant, nous avons relu les portraits que tu as dressés de toi-même. Tu es un idéaliste qui a basculé dans le fanatisme...C'est mal.

-Instructeur, j'ai résisté...

-Oui, Paul mais depuis que tu es ici, tu as bien avancé. Tu as résisté pour rien, c'est cela qui est grave, très grave même. Tu as mal agi. C'est pour cela que tu es rééduqué...

-Je suis sans cesse surveillé, instructeur.

-Oh mais voilà un petit garçon qui se plaint ! Quoi, je te passe la main dans les cheveux pour te consoler ?

-Vous vous moquez, Instructeur.

-Oui mais tu ne passes plus des heures nu devant moi à attendre mon bon vouloir et je ne te cravache plus !

Le ton était glacial et le regard dur. Quelles pouvaient être les limites d'un tel soldat dès qu'on le confrontait à un obstacle ? Il ne semblait en avoir aucune...

-Des regrets ?

-Non, Instructeur.

-Tu sais, Paul, quatre mois se sont écoulés et nous passons en phase 2 !  Tu as été rapide en évolution et as respecté les délais ! Quand je te dis que je suis content, c'est sincère !

Paul tremblait intérieurement. Les médicaments qu'on lui faisait prendre lui ôtait le sens commun mais ne l'empêchait pas d'avoir des craintes. Du reste, un jour, Winger ressortit la cravache de l'armoire métallique et il se mit à trembler.

-DS Cinquante-huit trois deux cent sept neuf était justement puni ! Je viens de te complimenter, toi Paul ! Crois-tu donc que je vais me montrer si retors ?

Paul n'était sûr de rien mais l'instructeur rapprocha sa chaise de la sienne et planta ses yeux dans les siens.

-Je te l'ai dit, tu passes en phase 2. Félicitations.

-Instructeur, vous me faites trop de compliments...

-Mais non ! Tu mérites des récompenses.

Winger présenta le manche de la cravache à Paul qui resta figé sur place, comme glacé de l'intérieur. Le bel instructeur était tout sourire.

-Ouvre la bouche.

Il fallut obéir. L'instructeur enfonça le manche de l'objet de terreur dans la bouche de son prisonnier, le transformant en objet de plaisir :

-Suce. Et ne quitte pas mon regard...

Paul obéit. Ses impressions étaient mêlées. C'était étrange et bizarrement excitant en fin de compte.

-Encore. Ton instructeur sait ce qui est bon pour toi.

Il suçait encore, conscient que la beauté physique de son formateur lui en imposait de plus en plus.

-C'est bien. Arrête.

Paul cessa immédiatement mais l'instructeur, adroitement cruel, réintroduisit le manche de la cravache dans sa bouche.

-Bien, très bien ! Tu en deviendrais gourmand, non ?

Paul rougit et n'osa pas répondre. Winger mit fin au jeu et posa la cravache sur le bureau. Elle n'était plus qu'un objet inerte qui était moins inquiétant.

-Ce n'est pas tout ! Tu as droit à un second présent ! Tiens voici des livres. Tu m'en réclames ! Note que ce sont de vrais livres et pas de la propagande...

27 mai 2024

Battles. Partie 1. Rééducation phase 2. Exposer Paul au désir et à la culpabilité.

 

Markus lui remit un lot de revues et de romans enveloppés dans un grand emballage brun.

-Ne suis-je pas généreux ?

-Si, Instructeur.

-Et avisé ?

-Également...

Paul prit l’ensemble et entra en cellule. Il lui suffit de jeter un œil sur les couvertures des revues et des livres offerts pour en comprendre la teneur. Tout était pornographique. S'il avait été dans son état normal, même affaibli et déprimé, Paul aurait hurlé et aurait refusé pareil présent. Mais il était un prisonnier en rééducation. Depuis qu'il était là, il n'avait vu qu'une toute petite partie de la prison mais il la savait immense et inviolable. On ne pouvait s'en échapper ni s'en approcher. Il n'y avait aucun moyen pour lui d’échapper à ses tortionnaires, aussi prit-il cette attaque de plein fouet. Il feuilleta donc tout ce qu'il put, contempla des images obscènes et lut des pages entières de mauvaise littérature. Accouplements grotesques, pédophilie, zoophilie : tout était présent. Quand l’écœurement vint, il déchira les revues en menus morceaux et il fit de même avec les pages des romans. A n'en pas douter, Winger aboierait après lui et peut-être jouerait-il de nouveau de la cravache...Mais il n'en fut rien et dans les jours qui suivirent, il ne le vit pas, ce qui le surprit.

-L'Instructeur n'est pas disponible, Gardienne ?

-C'est lui qui décide.

-Je souhaiterais le voir, Gardienne. Pourriez-vous  lui transmettre ma requête.

-Oui, détenu.

L'instructeur, quand il le vit, ne parut pas troublé.

-Tu voulais me voir ! Tu as insisté, il paraît !

Paul était mal à l'aise.

-Ces livres, je n'ai rien gardé, j'ai tout détruit...

-Oui et alors ?

-C'est une faute, Instructeur.

-Pourquoi ?

-J'étais un porc, je le suis toujours.

-Non ! Pas du tout !

-En êtes-vous certain ?

-Bien sûr Paul.

-Mais tout de même, Instructeur, c'était un présent...

-Ne t’inquiète pas, Paul. Je sais ce que je fais quand je t'offre un cadeau. Tu aimes les femmes nues, les grosses poitrines, les sexes épilés, alors pourquoi pas ? Mais nous ne nous sommes pas compris. Qu'à cela ne tienne : il t'arrive un autre cadeau...

L'entrevue fut brève. Winger avait autre chose à faire ; il le congédia. A priori, l'incident était clos mais à quelques jours de là, ce fut Xest qui monta au créneau.

-Tu as déchiré ces photos mais elles t'ont excité.

-Non Gardienne !

-Ah avec moi, ça ne marche pas !

Elle paraissait furieuse mais l'instant d'après, elle lui adressa un sourire engageant.

-Viens là.

Il la vit vérifier le verrouillage de la porte, voiler les caméras et se mettre nue. Elle voulut qu'il fasse de même :

-C'est que tu as été privé...

L'esprit troublé, Paul céda aux injonctions de la grosse femme persuadé d'obéir à son instructeur. Influencé malgré tout par les images qu'il avait contemplées, il fit brutalement l'amour avec elle, ce qui parut la ravir. Quand, échappant à une exaltation étrange qui s'était emparée de lui, il redevint calme, il s'interrogea. Le cadeau promis par le rusé Winger, c'était bien cet accouplement ? Il eut un doute puis se rassura. Oui, ce ne pouvait être que cela...

Rapidement, cependant, il fut convoqué. Depuis la veille, l'agent Xest n'était plus avec lui. On l'avait, semble t'il remplacé par un grand homme brun taciturne, l'agent Koba. Ce fut celui-ci qui le conduisit jusqu'au bureau de l'instructeur. Vêtu de noir, hiératique et superbe, celui-ci lui présenta un visage fermé.

-Merci Agent Koba, vous pouvez vous retirer. Paul, reste debout. Il faut qu'on s'explique.

Il venait de prendre la cravache qui avait tant effrayé Paul dans son armoire et le toisait.

-Mains dans le dos. Baisse les yeux. Tu te joues de moi, hein ?

-Je ne comprends pas, Instructeur.

-Ah non ? Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Tu as quelque chose à me dire...

-Ce sont ces photos déchirées !

Paul le vit lever le bras. Il allait être cravaché. Affolé, il gémit.

-Mais si ce n'est pas cela, qu'est-ce c'est ? Pardon, Instructeur.

-Qu'est-ce que tu as fait avec l'agent Xest ?

-Tout ce qu'elle a demandé, Instructeur.

La cravache était posée sur sa joue. L'instructeur se contenait encore.

-Et d'où as-tu sorti que tu devais lui obéir ?

-Mais c'est la règle, Instructeur ! Vous même m'avez dit de faire tout ce qu'elle demandait.

C'était litigieux puisqu'il n'avait jamais été question de sexe entre elle et lui mais Winger, interpellé, ne cravacha pas. Il alla s'asseoir à son bureau et parut pensif.

-Paul, dis-moi comment ça s'est passé.

-L'agent Xest me voit nu tous les jours. Cette fois, elle s'est montrée provocante.

-Provocante ? Elle ! C'est un comble ! 

-Elle a beaucoup crié elle m'a dit que c'était une suite logique, Instructeur, que ça allait de pair avec mon conditionnement...

-On te conditionne pour que tu répondes aux avances d'une truie ?

-Non, bien sûr que non, Instructeur.

Paul était affolé. Winger prit un air de conspirateur.

-Où t’a -t’elle surtout touché ?

Paul rougit et baissa les yeux.

-Où ? Réponds.

-Elle a touché mon sexe...

-Ah oui bien sûr...Et toi ? Regarde-moi et réponds.

Paul balbutia :

-Ses seins, sa..., enfin vous savez bien, Instructeur.

-Non, justement, je ne sais pas. Et tu as osé faire cela... 

Il y avait de quoi être terrorisé et Paul se courba sous le poids de la honte. Il savait ce qu'il en coûtait de mécontenter Markus Winger.

-Vous m'avez dit que je finirais par la trouver agréable...Je ne sais pas...J'ai pensé que c'est vous qui...

 

 

27 mai 2024

Battles. Partie 1. Paul commet une haute. Colère de l'instructeur.

 

Winger se redressa et le regarda, effaré.

-Moi ? Je voulais que tu baises cette truie ?

-Instructeur, j'ai pensé que oui...

Paul était mortifié. Xest s'était mise nue et avait exigé des gestes, des actes. Elle avait une poitrine énorme et entre les cuisses une fourrure épaisse et noire qui lui descendait sur le haut des cuisses. Il avait peiné, elle s'était mise à gémir en le maintenant sur elle... Que pouvait-il dire ? Qu'il n'avait pas pu se contenir après des mois de privation ? Qu'elle avait tellement raillé le mâle en lui qu'il avait voulu lui montrer de quoi il était capable ? L'instructeur était bien trop adroit pour le croire sur paroles. 

-Quoi ! Tu as pensé que oui ! Eh bien, c'était, non. Elle s'est servie de toi et elle s'est jouée de moi. Tu sais qu'il n'y a rien sur les caméras de surveillance ?

-Instructeur...

-Ah mais quelle garce ! Bon, heureusement, quelqu'un l’a balancée. Tu ne la reverras pas. Elle est punie...

Paul resta silencieux. Le pire était à venir. L'instructeur, courroucé, marchait de long en large et sa voix était pleine de colère :

-Paul, pourquoi as-tu reçu ces livres ?

-J'ai cru...

-Pourquoi ?

-Pour être dégoûté de moi-même. A cause des maîtresses que j'ai eues et des prostituées que j'ai fréquentées. C'étaient des images vulgaires et agressives, des accouplements grossiers. J'ai aimé ce genre de corps de femmes. J'ai aimé le sexe un peu brutal avec...avec...

-Et donc, ça t'a éclairé sur toi-même ?

-Oui, Instructeur. J'ai été écœuré...

-A tel point que tu as déchiré ces pages car elles te soulevaient le cœur !  Je t'ai dit que tu avais tort mais c'est faux ! Je t'ai amené à détester ton goût pour ces femmes lubriques car elles sont malignes, pernicieuses et peu dignes de confiance ! Tu as honte, ce qui montre bien que tu es d'accord avec moi mais très peu de temps après, tu montes ta gardienne ! Et tu crois que c'est mon plan ? C'est totalement contradictoire, pourtant ! Quelle image as-tu de moi ? Quelle image !

Il s'était approché, insidieux et le toisait de nouveau.

- Réponds !

-Terrifiante, Instructeur.

-Mais cohérente ! Hein, je suis cohérent !

-Oui, oui, cohérent Instructeur...

-Et admirable ?

-Certainement, Instructeur.

-Je n'ai pas commandité cela.

-Pardon, Instructeur.

-Quel besoin avais-tu de fourrer cette truie, Paul ?

Paul resta muet.

-On t'a donné des médicaments qui t'ont ôté tout désir sexuel les premiers mois mais ton traitement est inversé maintenant. Tu peux bander comme un âne tout en restant sous contrôle. J'aurais dû me méfier, pas de toi mais d’elle ! Elle t'a eu !  Franchement, elle est presque obèse ! Et malgré tout, ça t'a plu !

-Non, ça ne m'a pas plu, Instructeur...

Winger eut une grimace obscène et Paul se sentit plus effrayé encore :

-Menteur !  Tu l'as fourrée ! Elle a eu droit à ton foutre !  Je pensais sincèrement que tu avais fait du chemin et que tu étais à même de ne pas répéter tes erreurs. Illusion !

Il va me battre...Paul était sidéré à l'idée de la correction qu'il allait recevoir. En matière de gifles, de coups de poings et de coups de pied, il n'y avait rien à apprendre au bel instructeur. Mais alors qu'il se résignait, Winger balaya l'espace d'un geste de la main et temporisa.

-N'aie pas peur ! Je ne vais pas te frapper, voyons ! Enfin, sauf, si tu l'exiges...

-Je vous ai déçu, Instructeur.

-Oui. Que veux-tu de moi ?

La cravache était posée en travers du bureau, luisante.

-Pas elle ? Tu ne l'aimes pas hein ?

Paul frémit.

-Puni, je dois l'être, je le sais bien... 

-Ah, je savais que tu y tiendrais !

Les gifles tombèrent sournoises et plus fortes encore et Paul qui avait reçu l'ordre de placer ses mains dans son dos, n'osa les éviter. Pour finir, Winger prit sa cravache...

-Dis merci.

-Merci Instructeur.

-Bon, je t'ai mis Koba comme gardien. Muet comme une carpe et bien dressé. Même principe. Surveillance, convoyage et fouille au corps. Tu ne verras que des hommes. Une question ?

-Mais la fouille au corps, enfin vous savez bien...Je suis filmé sans cesse, je vous en prie, instructeur, ce n'est pas si nécessaire...

Abattu, Paul resta silencieux. Winger s'approcha très près de lui et lui murmura à l'oreille :

-Qui commande ici ? Qui sait ce qui est bon pour toi ? Moi, je le sais, Paul. Tu as commis cet impair mais tu en ressortiras renforcé. Tu tiens à ton instructeur et ton instructeur à toi...Quoi d'autre !

-Rien, Instructeur.

-Je comprends pour la privation sexuelle, Paul, je ne suis pas un monstre, tu sais ! Si tout se passe bien, moi, dans ma mansuétude, j'aurais des solutions à te proposer mais en attendant, plus rien, tu entends ? Plus rien.

Il ricanait maintenant, comme un mauvais élève content d'une obscénité qu'il a dite, puis il reprit :

-Je t'ai promis une récompense. Dans ta sottise, tu as pensé qu'il s'agissait de cette chienne mais je t'ouvrirai les yeux !

Ces yeux bleus si durs, ce visage impérieux, cette violence suave...Ce qu'il avait lu sur la prison Étoile était vrai. On vous y détruisait.

Publicité
Publicité
27 mai 2024

Battles. Partie 1. Rééducation à Etoile. Phase 2. Paul dans l'embarras.

 

La seconde période commençait mal et dans les temps qui suivirent, ce fut pire. Tout s'estompait. Paul perdait le fil des jours et des heures. On l'avait encore changé d'atelier et cette fois, il mettait des biscuits dans des boites. Chacun portait des masques et personne ne parlait d'autant qu'une musique tonitruante envahissait les salles de travail dès son arrivée et ne s'arrêtait jamais. C'étaient des airs militaires, des hymnes...Le trajet entre ce nouvel atelier et le bureau de Winger était long et celui-ci s'était mis à le convoquer pour un oui pour un non, ce qui acheva de le déstabiliser. Paul, malgré tout, ne se trompait plus jamais sur les couleurs des vêtements à porter en fonction des semaines, prenait toujours ses traitements. Il avait belle apparence malgré les coups reçus car à Étoile, on utilisait de puissants cicatrisants qui rendaient vite invisibles les traces de maltraitance. Le détenu en gardait la mémoire mais il lui était impossible d'aborder le sujet devant celui qui niait tout. Je t'aurais cravaché au visage et on ne verrait plus rien ? Qu'est-ce que tu me chantes ? Attention, détenu, tu cherches à me mettre en cause ?

sur ses gardes, il était ponctuel aux rendez-vous de Winger et parlait beaucoup. Celui-ci avait réussi une fois encore à le retourner. Paul   avouait avoir quitté sa solide position de journaliste adulé pour poursuivre un idéal un peu fou. Il avait voulu être le garant de la vérité, celui qui dénonce une dictature car il en connaît tous les secrets. Il avait encouragé la violence et l'aveuglement...Fin stratège, Winger alternait questionnement sur la vie publique et interrogations privées. Sans qu'il le voulût vraiment, Paul lui permettait de savoir quel jeune homme amoureux il avait été, quel mari, quel père et quel amant. Il en disait sur sa sexualité bien plus qu'il ne le croyait et quand il lui venait des moments de lucidité, il avait peur d'en avoir tant dit. Du reste, Winger finit par lui faire remarquer qu'il était paradoxal :

-Avant d'être en cavale, Paul, tu as eu beaucoup de femmes en dehors de ton épouse légitime.

-Oui, instructeur, je sais, c'était mal...

-Ta femme était revêche, désagréable et qui plus est, assez laide !

-Mais non, je...

-Quoi ? Pas de seins, une touffe rousse ! Évidemment que tu es allé vers de belles femmes...Cela m'amène à une remarque de fond. Je vais te faire relire ce que tu m'as dit lors d'un de nos entretiens. Tu aimes les femmes pour leur force sexuelle et une certaine sauvagerie qu'elles ont et qui te plaît mais dès qu'il s'agit d'admirer, de s'inspirer de, de copier, de s'aligner sur, tu te tournes vers les hommes. Ça commence avec ton père et ça continue avec des enseignants que tu as eus, des écrivains, des philosophes, des journalistes...Et tu sais quoi ? Tu aimes la virilité, le courage, le sacrifice...Tu aimes l'aplomb et la solidité. J'ai là une lettre de ton frère, celui qui nous sert si bien. Il te décrit exactement comme je le fais : épris d'Alexandre le Grand, de César, de Shakespeare, de Napoléon, ou encore de Bismarck. Il dit que tes amitiés masculines étaient sélectives et très fortes quand tu étais enfant et que...enfin...Comment te dire ça en te ménageant...Il le faut car tu as fait de si grands progrès...Bref, il dit qu'à son avis, tu as pris femme par convenances sociales. Il en est allé de même de tes maîtresses que tu as collectionnées pour affirmer ta virilité. Tu t'es menti.

Winger eut un sourire perfide : il était prêt à poursuivre.

 

27 mai 2024

Battles. Partie 1. Paul et l'instrustreur Winger. Contrainte et obligation de se contredire.

 

Tu utilises les femmes mais ce sont les hommes que tu aimes. On va débrouiller tout ça Paul...

-Lequel de mes frères a dit cela, Instructeur ?

-Le plus jeune, imbécile. Bon, venons-en à cette Lisbeth...

-Je me suis marié par amour, instructeur.

-Oui, tu as écrit ça, je l'ai lu.

-J'aime toujours ma femme.

-Mais elle est crevée, non ?

-Instructeur, je n'en suis pas sûr. Et quand bien même, est-ce ça empêche d'aimer ?

-Il me semble que oui. Qu'est-ce que tu aimais chez ta femme ? Elle n'avait ni gros seins ni gros cul...

-Instructeur, j'aimais son intelligence, sa vitalité, ses cheveux, ses lèvres. J'ai aimé la voir enceinte.

-D'enfants dont tu t'es débarrassé...

-Je les ai fait partir pour les protéger.

-Ou parce qu'ils vous gênaient. L'hystérie de ta femme ne t'a pas dérangé ?

-Elle était excessive pas hystérique.

-Faux. Je dispose d'un diagnostic sur elle. Un excellent psychiatre.

-Tu t'es amusé avec d'autres femmes et elle-aussi elle t'a trompé !  Avec des hommes et avec des femmes. Tu savais qu'elle était lubrique ?

-J'étais insatisfait moi-aussi.

-Réponds à ma question. Tu le savais ?

-Elle tombait vite amoureuse, Instructeur.

-Ah ah ! En dix ans, elle a eu au moins quatre liaisons dont deux féminines.

-Je l'aime toujours et elle m'aime aussi.

-Tu ne l'as pas vue depuis plus de quatre ans. Ton mariage a été un échec.

-Je ne pense pas, Instructeur.

-Tu refuses de le voir. Mais tu te rendras à l'évidence...Si elle est encore vivante, à l'heure actuelle, elle est sans doute au lit avec une femme qui lui bouffe la chatte. Tu te sens respecté ? Non, tu ne le peux pas. Et si elle est morte, qui te dit qu'elle a pensé à toi en dernier lieu ?

-Moi, avant de mourir, je penserai à elle.

-Tu penseras à cette bouffeuse de chattes ?

-A ma femme.

-Tu es coriace Paul mais tu perds du terrain ! En tout cas, je ne m'ennuie pas...Et puis, ce n'est certainement pas d'elle que tu rêveras quand tu seras à l'article de la mort.

-De qui, alors, Instructeur ?

-De quelqu'un qui aura été un vrai compagnon, un compagnon loyal. Tu es en bonne voie pour le rencontrer dans quelques temps. Tout d'un coup, tu sauras. Bon mais tu n'en es pas là. 

Winger parut avoir terminé mais soudain, il de reprit.

-Au fait, j'ai pris un rendez-vous pour toi.

-Un rendez-vous, Instructeur ?

-Oui, il y a deux bordels ici. L'un est réservé à l'élite du camp ; directeur, administratifs, instructeurs et l'autre est réservé à un petit lot de prisonniers. Dans le premier cas, les filles sont des prisonnières. Elles ne touchent pas d'argent mais mangent un peu mieux et sont surveillées médicalement. Dans le second, elles sont stylées. Certaines sont déjà expérimentées et les autres sont très studieuses. Malheureusement, ce bordel haut de gamme t'est fermé. Je t'en ai choisi une dans le bordel de base. Une jolie fille. Elle a dix-neuf ans.

Paul la vit une fois puis une autre. Il prit un plaisir aveugle puis revit le bel instructeur.

-Bon, cette pute ?

-Vous la connaissez, Instructeur ?

-Ne m'insulte pas. Pourquoi la connaîtrais-je ? Je t'ai permis de te soulager, rien de plus. Alors ?

-J'ai bien aimé.

-Bien aimé ! Tu me fais rire !  Mais je suis optimiste et généreux.

Winger avait raison de l'être car Paul avait beau se battre courageusement, il en arrivait à se contredire.  Cette prostituée avait été accommodante avec lui et oui, il avait pris son plaisir mais elle l'avait presque dérangé en ayant des formes aussi féminines. Et elle était trop maquillée aussi. On lui en fournit une autre qui avait un corps peu féminin. Plutôt androgyne, en fait. Peu de hanches, de petits seins et un visage un peu dur qui, si elle avait eu les cheveux courts, aurait créé le doute sur son appartenance sexuelle...

-Elle était mieux ?

-Oui, Instructeur. J'aimais mieux son corps.

-Ah oui, pourquoi ?

-Des seins menus, des hanches étroites...

-Pas trop maigre ?

-Non, Instructeur.

-Bonne sexuellement ?

-Oui, Instructeur.

-Je pensais que tu les aimais bien en chair et avec une grosse poitrine mais tu changes, on dirait ! Bon, je dirais qu'on t'en donne des comme ça. Cheveux courts. Presque des jeunes garçons...

Paul commençait à comprendre que le bel instructeur avait lui-aussi quelque chose d'androgyne. Ce teint clair, ces longs cils, cette bouche...Winger détenait un pouvoir sur lui et celui-ci allait au-delà de la crainte qu'il lui inspirait car il procédait du désir...

-Non ?

-Un peu plus de poitrine...

-Ah, ça te reprend. Les gros seins.

-Pardon, Instructeur.

Quand il était critique, le regard bleu dur de l'instructeur Winger brillait d'une joie cruelle.

-Comment ça pardon ? Qu'est-ce qu'il y a ? Je fais erreur ?

-Tout est si confondant, Instructeur.

-Je me trompe oui ou non...

-Instructeur…

-Oui ou non !

-Oui.

Un coup entre les jambes le faisait se plier de douleur.

-La réponse est non. Ce que tu veux, je le sais mieux que toi !

24 mai 2024

Battles. Partie 1. Rééducation. Phase trois.

 

Winger lui avait pris un rendez-vous avec une autre fille, longiligne cette fois et il le nargua. Refuser de la voir était impensable. Ne pas faire de compte rendu non plus. Chaque séance se terminait par une invitation à bien réfléchir. L'instructeur prenait des airs gourmands.

-Tu fais le tour de toi-même. Tu me dois d'être devenu si clairvoyant ! Je suis bon, je t'ouvre des perspectives et je ne t'empêche pas de baiser. Ta vie reposait sur une mauvaise hiérarchie des valeurs : ce n'est plus le cas !

Et il ajouta :

-Je me suis appuyé sur nos entretiens pour rédiger tes aveux. Il te faudra les signer. Ils sont obligatoires pour ton passage en phase trois. Ce n'est après tout que l'aveu de tes forfaitures...

Dans les jours qui suivirent, Paul passa par tous les stades, de l'apathie à l'exaltation. Il sentait qu'il allait signer des documents qui l'engageaient complètement, qu'il allait se renier et en le faisant, entraver l'action de la résistance. S'il ne signait pas, on le battrait ou le tuerait. La manœuvre de Winger visant à lui faire renier sa vie passé pour adopter de nouveaux idéaux.

-Tu deviendras un chantre du régime, un journaliste qui a su se repentir et parler différemment. Tu seras soutenu, tu seras acclamé.  Sur Jorge Dormann, on en raconte tellement ! Ne crois pas que tu seras persécuté une fois réhabilité…Le Régime ne fera rien à quelqu'un de ta trempe, il a trop besoin de toi. Bientôt, tu nous auras tout promis. Tu pourras nous servir. Et de toute façon, tu auras ton Instructeur à tes côtés !

« Je soussigné, détenu cinquante-quatre vingt-trois deux cent sept neuf DS, atteste avoir exercé les activités illicites suivantes... »

-Signe, Paul, signe.

Paul regardait les feuillets mais restait interdit. Winger, penché à son oreille, parlait froidement.

-Paul, je fais exécuter la dernière pute que je t'ai fourni si tu ne signes pas.

Il restait immobile.

-Je ferai en sorte de faire arrêter des civils qui avaient un vague rapport avec toi et ils seront fusillés. Si tu ne le souhaites pas, signe !

Outre l'horreur de ce qu'on lui demandait, c'était la fascination que le bel instructeur exerçait sur lui qui le crucifiait chaque jour davantage. Sous les vêtements réglementaires, le corps nerveux et presque aristocratique de son geôlier était une preuve de sa force. Des pensées l'agitaient. Il se disait souvent : "Je pourrais être comme lui, si altier. C'est un Seigneur, j'en serais un. "

-Signe. Tout est en route : ils mourront et qui se souciera d'eux ?

Et il signa. Winger exulta :

-Ah, enfin ! Avec toi, ça aura vraiment été un plaisir ! Je crois toujours que ça y est, j'ai tout annihilé en toi et non...Tu te redresses ! Mais ça y est, tu as signé tes aveux. Ta femme s'est enfuie mais tu pourras divorcer d'elle. Tes enfants sont en Amérique et ils n'auront rien de tes avoirs. De toute façon, tu les as reniés.

Il se tenait contre le mur, tout en noir, guettant les réactions de Paul.  Celui-ci se mordit les lèvres et serra les poings, refusant de voir que le sourire de l'instructeur s'élargissait. Celui-ci s'approcha, effleura de la main la joue de Paul puis lui dit :

-J'aurais dû t'abattre si tu avais refusé mais j'ai su te convaincre. Remercie ton instructeur.

-Merci Instructeur Winger.

Le jeune homme était tout près de lui : il avait un cil sur la joue et Paul hurla intérieurement. Le lui retirer aurait ressemblé à un aveu criant de désir. Mais portant une main à son visage, Markus y trouva lui-même le cil et le tint entre ses doigts.

-Oh, regarde ! Ouvre ta main, détenu !

Et il l'y déposa en fixant Paul sans se départir de son sourire. Et il ajouta :

-Phase trois.

Elle commença par une opération dite bénigne dont on ne lui dit rien. Elle serait suivie d'une autre un mois après puis d'une dernière en fin de parcours. Dans chaque cas, Paul se remettrait très vite. Il acquiesça et ne posa pas de question. On ne lui ne demanda plus de travailler mais d'occuper un bureau et d'y écrire l'inverse de ce à quoi il avait cru. Il devait lire son travail à Winger et déclamer ensuite ses textes. Il s'occupait aussi de communications internes à la prison, rien de crucial, rien que des propositions de banquets ou des meetings sportifs pour les membres de l'encadrement.

On lui demanda parallèlement de faire du sport en salle et il devait voir un masseur et un kiné. De plus, des médecins expérimentés s'occupèrent de son visage et de son corps et il eut belle allure.

24 mai 2024

Battles. Partie 1. Fin de formation. Paul rééduqué.

 

On l'avait changé de cellule depuis qu'il avait signé ses aveux et il logeait maintenant dans la même aile que son instructeur. Celui-ci exigeait maintenant qu'il récite des professions de foi. Il avait renié sa femme et son mariage d'une part, ses mentors et ses références philosophiques et littéraires de l'autre. Il posait sa candidature à une société d'intellectuels qui tous prônaient la supériorité du fascisme sur les autres régimes. Dès son retour dans le monde, il l'intégrerait. Ainsi, tout était transformé en lui et il lui était simple désormais de vanter l’œuvre de Dormann. A ce stade de sa reprise en main, Paul avait cessé de s'inquiéter de son absence totale d’esprit critique et de rébellion.

Winger et lui conversaient beaucoup mais cette fois, ils nouaient une complicité intellectuelle. Le ton de leurs conversations était courtois désormais et non plus empreint d'agressivité et de peur comme aux premiers temps. Il était pourtant très clair que Paul avait intégré un schéma dans lequel Markus lui était à la fois supérieur et indispensable. Qu'il ait tué Battles en lui était le meilleur qu'il ait pu faire !

Tous deux faisaient du sport ensemble, jouant au tennis ou nageant de concert. Il existait à Étoile bien d'autres lieux que les cellules de prison, les divers ateliers et les salles de stockage et bien lieu du centre hospitalier où de l'unité pour les fortes têtes. Il y avait de fort belles installations. Beaucoup de gens travaillaient là et il leur fallait des logements, des magasins spéciaux, des installations sportives et mêmes des écoles. Il y avait un jardin d'enfants et les familles qui avaient des animaux domestiques fréquentant parfois un vétérinaire. Ainsi, si pour une bonne part des habitants de cette zone, la vie était un cauchemar, pour d'autres, elle avait des côtés agréables. L'appartement de Winger était petit mais cossu et confortable et il allait de même du studio dans lequel Paul vivait désormais. Il portait toujours un uniforme mais composé d'un pantalon et d’une veste stricte mais bien coupés, il n'était pas diminuant. On lui avait donné de belles chemises et de belles chaussures et pour ce qui était de son apparence physique, il avait désormais droit à un kiné et un masseur. Qui l'aurait croisé ainsi, dans un contexte différent, l'aurait trouvé accrocheur et séduisant. Et pour ce qui était de son travail, il n'était plus qu'intellectuel.

Restaient les besoins physiques, l'amour étant exclu.

-Je peux demander une dispense pour que tu acceptes au vivier des cadres.

-Je ne suis pas certain...

-De le mériter ? Bien sûr que si. Elles sont plus belles. Mais bon, il te faudra attendre la réponse des autorités.

-Mais vous ?

Winger haussait les épaules.

-Que tu sois à mes côtés me suffit.

S'il n'avait été à ce point conditionné, Paul aurait été saisi d'horreur à par ses propos mais il n'en était rien. Markus était chaste, voilà tout.

Plus tard, il lui annonça d'ultimes examens médicaux.

-Ils sont nécessaires, Instructeur ?

-Bien sûr, Paul ! Mais tu ne dois pas t'inquiéter car tu es dans une forme excellente !

-Vous me rassurez. J'ai déjà subi deux opérations.

-Elles t'ont fait le plus grand bien.

-Mais je l'espère...

-Il y aura juste une petite chose, un simple ajustement final...

-Oui, Instructeur.

A la clôture de la troisième phase, tous deux partiraient pour Dannick et là, Markus piloterait ce journaliste rebelle soudain repenti dans les couloirs du plus grand quotidien national où il devait rapidement devenir une vedette... Le jeune instructeur en concevait une grande fierté :

-Tu es ma meilleure réussite ! Bientôt tu montreras au monde combien ton pays est grand et son dirigeant puissant ! Tu seras l'image même de celui à qui on a ouvert les yeux ! Quel impact sur nos détracteurs ! Nous formerons une alliance tous les deux et nous serons inattaquables. Nous sommes la race des seigneurs !

Entre partie de tennis, natation et partie d'échec, Paul s'essayait à écrire des articles sur l'économie du pays, son armée, ses institutions culturelles et la personnalité de son chef. Il s'agissait plutôt d'exercices mais Markus tenait à ce que son disciple les fasse afin de le préparer à sa mission. Quand les textes étaient écrits, le dangereux instructeur les commentait. Il était content.

 

 

24 mai 2024

Battles. Partie 1. D'inutiles stratégies pour fuir.

 

Ils eurent un jour une conversation importante. Winger voulait connaître les scénarios inventés par le détenu DS cinquante-huit trois. Deux cent sept neuf quand il était arrivé sur les lieux et qu'il croyait possible de s'échapper...

-J'ai bien pensé à rejoindre la partie centrale, à me faufiler à l'extérieur et à monter dans un camion en partance pour des terres plus clémentes. Et ensuite, j'ai imaginé une autre stratégie. Je passais d'une aile à une autre et rejoignait le secteur de l'alimentation et là aussi, je cherchais un convoyage pour Dannick, cela ne présentait pas grand intérêt. Mais j'ai vite été déstabilisé et j'ai compris aussi que je ne réussirais pas.

-Rien d'autre ?

-Je me suis dit que je parviendrais à m'emparer d'une arme et que je pourrais vous prendre en otage. C'était risqué car je ne suis pas un bon tireur et vous, si...Dans le meilleur des cas, j'arriverais à me mettre au volant d'un véhicule et je m'enfuirais...

-C'est tout ?

-Non. J’ai pensé à me mettre en danger : intoxication médicamenteuse, défenestration, asphyxie...Mon état serait trop grave pour qu'on puisse me laisser sur place. On m'évacuerait et je filerais...

-Merveilleux !

-Ce n'était que des rêves, Instructeur...

-Des rêves dangereux pour un détenu. Tu serais mort très vite. Mais changeons de sujet ! A Dannick, tu prendras des leçons de tir. Ça peut toujours servir...

-Instructeur, apprendre à tirer ? J'ai déjà quelques connaissances.

-Oui, je sais. Le régime a des ennemis, tu es bien placé pour le savoir. Tu apprendras bien mieux. Tu ne manqueras pas ta cible.

 

Paul, qui ne savait plus rien de l'extérieur, ne comprit pas pourquoi son départ était repoussé ni pour quelles raisons il lui était demandé de rester deux mois de plus. Pour le tester sans doute, on lui avait confié des cours d'instruction générale à dispenser à une vingtaine de détenues. Certaines étaient là depuis très longtemps et étaient sujettes à d'importantes pertes de mémoire. Paul travailla avec elles pendant près de deux mois sans avoir la moindre idée de ce qui les attendait. Il était bon pédagogue et bien que ferme, il n'était pas cruel de sorte qu'elles l'aimaient. Elles avaient été dissidentes à ce qu'il avait su ;  en réalité, elles n'avaient souvent été que de simples boites aux lettres ou des campagnardes qui avaient accepté par bonté d'âme et solidarité de cacher des fuyards. Le système judiciaire du Guide Dormann les avait condamnées sans état d'âme à une mort lente et à une lente déchéance. Mais pour Paul qui les instruisait, rien n'allait de soi.

Publicité
Publicité
1 2 3 4 > >>
LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
Publicité
Archives
Publicité