Battles. Partie 2. Transfert à Stockholm
On lui annonça quelques temps plus tard qu'on le transférait à Stockholm où il serait hébergé par des militants qui avaient œuvré, entre autres, à sa libération et il ressentit un mélange de peine et de joie. Il salua plus particulièrement le directeur de la clinique, le chirurgien, Monica et Lynn. A la première, il promit d'envoyer le texte des articles de journaux qu'il écrirait. Elle y tenait. Elle resta digne, bien qu'émue, et refoula ses larmes. Elle avait vu Paul lutter pour se redresser et se battre contre des fantômes. L'aventure qu'elle avait vécue avec lui était singulière. Il en alla différemment de Lynn, la jolie aide-soignante qui lui avait lu avec cœur Selma Lagerlöf.
-On ne me donnera plus de patient comme vous avec comme mission de lui lire de belles histoires !
-J'en avais vécu de fort tristes. Il m'en fallait de belles. Vous avez su les rendre passionnantes.
Elle se mit à pleurer.
-Vous ne serez plus là !
-Quoi ? Vous me regretterez !
Il tentait d'être léger et de contourner le trouble de cette jeune fille si droite et si atteinte par lui. Allons donc, les vieux automatismes avaient dû reprendre leurs droits. Qui sait ce qu'elle avait capté de ses regards, de ses silences, cette petite fille. Il avait su si bien y faire autrefois...
-Lynn, vous avez une grande faculté d'écoute et ici, vous faites le bien. Vous aiderez d'autres patients.
-Vous me plaisez, je vous aime.
-Non, vous croyez m'aimer.
-Ne parlez pas comme ça !
Elle sanglotait.
-Nous nous sommes charmés l'un l'autre et je me souviendrai de vous.
D'ici quelques mois, vous serez amoureuse...
-Comment savez-vous cela ?
-Mais vous le laissez entendre. Je sais écouter les paroles muettes. Il sera de votre âge et charmant. Et il sera suédois.
-Si vous pouviez rester, je pourrais vous dire comment ça se passe. Vous me conseilleriez. Physiquement, vous n'êtes pas du tout comme mon père, et vous seriez de meilleur conseil !
Pas du tout comme mon père ! Paul ne put que sourire.
-Comment cela ?
-Il a toujours peur qu'un homme me fasse du mal !
-Et votre mère ?
-Aussi je crois, mais elle parle peu.
-Vous avez vingt-quatre ans et je vous sens solide. Tout ira bien. Je l'ai dit, ce sera un très gentil garçon.
-Et vous ?
Il fut touché et amusé.
-J'étais en fuite puis en prison puis hospitalisé. Lynn, quelles perspectives voulez-vous que j’aie ?
-Vous êtes marié ! Vous retrouverez votre femme !
-C'est vrai...
-Il paraît que vous avez une fille.
-Elle est un peu plus jeune que vous. Après des années, je risque de la revoir. Et j'ai un fils aussi...
Elle se lova dans ses bras et il accepta cette étreinte qu'il considéra comme filiale puis il embrassa la jeune fille sur le front.
-Au revoir, Lynn.
-Au revoir, Paul.