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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
18 avril 2024

Battles. Partie 2. Le roman policier de Daphne.

 

Ce fut une belle période. Elle allait chez lui et lui chez elle et ils œuvraient ensemble. Daphne avait choisi comme victimes un lot de vieilles dames fortunées, comme tueur, un jeune homme désaxé et comme justicier un fringant policier quadragénaire. Ce ne serait pas un grand roman mais une lecture qui aurait ses exigences. Le lectorat, cette fois, ne pourrait faire la fine bouche...Deux mois durant, ils rédigèrent et l'esprit de Paul s'emplit de décors variés, d'armes diverses, de mobiles sordides et de vies perdues. Il avait besoin de cette rémission car, il le savait, il ne lâcherait pas ses objectifs. Le livre sur l'instructeur serait écrit et la traduction faite. Quand il rentrait chez lui et qu'il ouvrait sa boite aux lettres ou qu'il regardait sous sa porte, il ne trouvait rien de répréhensible. Mais, il le savait, cela viendrait.

Interrogeant un jour Daphne sur la culture de son père, il reçut cette réponse triomphale :

-Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi cultivé que lui ! Les littératures grecques et romaines n'ont aucun secret pour lui !

-Il a d'autres centres d'intérêt ?

-L'équitation je te l'ai dit.

-Et les dictatures ?

-Mais certainement pas ! Il aime l'histoire, ça, c'est sûr.

-Il ne soutient pas que toute critique sur un régime dictatorial est infondée ? Il y a une logique en tout, une race est forcément supérieure à une autre, une grande partie de la population n'est faite que pour être soumise et travailler, une autre est constituée de parasites...

-Mais d'où cela sort-il ? Mon père t'a reçu chez lui !

-Il ne te dit pas tout de lui-même.

-Pourquoi écrirait-il des choses pareilles ! Je ne prends pas ça au sérieux !

-Admettons. Et ta mère ?

-Elle aime la musique et les livres. Qu'est-ce que tu veux savoir ?

-Rien, ma chérie.

Paul préféra changer de sujet ; il ne voulait pas que Daphne s'étonnât de son questionnement. Il avait  été très sûr d'elle, il l'était moins. Disait-elle bien tout ce qu'elle savait ? Il préféra revenir à son roman.

-« La Dérive de Tom ? » n'est pas un titre accrocheur !

-C'est mon roman, Paul.

-Fais comme tu veux.

-Non, propose.

- « Une larme de rhum dans mon thé ». Je te l'ai déjà dit. Toutes ces dames âgées ont cette faiblesse. Ça suscitera l'intérêt, je t 'assure.

-Oui, d'accord. C'est drôle en plus !

Il lui sourit. Le roman était bouclé mais ils firent encore des corrections, Paul insistant lourdement pour qu'elles se fassent. Le manuscrit fut envoyé. En attendant l'impression du texte, Daphne se préoccupa de l'avancement des travaux de la librairie dont elle voulait être la reine. Ce ne serait pas seulement un espace de lecture où on pourrait acheter des ouvrages et entendre des auteurs s'exprimer, ce serait aussi une petite salle de spectacle et un restaurant salon de thé  Une si jeune femme à la tête d'un pareil édifice, cela était surprenant si on méconnaissait la fortune des Brixton et leur ambition. Si on la connaissait, tout coulait de source. Quand les livres emplirent les rayonnages et que la décoration du restaurant et de la salle de spectacle furent terminées, ils furent ravis. Elle, plus que lui. Du premier étage, on avait une vue splendide sur les rues environnantes et Paul qui s'en émerveillait fut soudain perplexe. Il était aussi facile d'observer les passants d'en haut qu'à ceux-ci de vous guetter. Rien n'avait d'importance pour l'instant mais le vernissage approchait. Il y aurait beaucoup de monde. Et en effet, la fête quand eut lieu attira des kyrielles d'invités. On photographia beaucoup la reine des lieux et on l'interviewa. Paul était au premier étage quand il aperçut dans la rue un long jeune blond et un autre, plus massif et très brun. Ils bavardaient entre eux avec animation, indifférents semble t'il à cet événement dont ils ne savaient rien. Toutefois, Paul ne fut pas dupe. Le jeune homme blond leva la tête et le regarda sans sourire. Tout était très clair. C'était le cavalier blond. Il le fixait mais Paul ne baissa pas les yeux. L'échange dura quelques secondes puis l'inconnu vêtu de noir fit un signe de la main, comme pour saluer. Comme pour mettre fin à son trouble, la voix de sa jeune amante le fit revenir à la réalité.Le temps que Paul se retourne, l'inconnu blond avait disparu avec son comparse.

-Je te cherche.

Daphne était dans son dos et ses parents la suivaient.

-Père trouve que tu as eu raison pour le titre de mon roman. Il est drôle et percutant.

Lord Brixton était souriant mais son regard était froid. Celui de sa femme aussi.

-C'est une fête magnifique !

-Oui, Daphne.

En rentrant chez lui, après le vernissage, Paul s'attendit à trouver un nouveau courrier anonyme. Il n'y en avait pas. Daphne, la librairie, les deux jeunes hommes, ce pouvait être une diversion. Il ne touchait pas au livre sur l'Instructeur et laissait en plan ses projets de traduction. Il cédait en fait. Sur une feuille de papier, il écrivit à l'encre noire :

 Vous pensez gagner ?

Il alla se faire un café et ne revint dans sa chambre qu'une heure après. Il y a un message à l'encre rouge sur la feuille.

 Évidemment. Tu as embrassé mes bottes.

Çà laisse des traces...

  

Ce fut une belle période. Elle allait chez lui et lui chez elle et ils   œuvraient ensemble. Daphne avait choisi comme victimes un lot de vieilles dames fortunées, comme tueur, un jeune homme désaxé et comme justicier un fringant policier quadragénaire. Ce ne serait pas un grand roman mais une lecture qui aurait ses exigences. Le lectorat, cette fois, ne pourrait faire la fine bouche...Deux mois durant, ils rédigèrent et l'esprit de Paul s'emplit de décors variés, d'armes diverses, de mobiles sordides et de vies perdues. Il avait besoin de cette rémission car, il le savait, il ne lâcherait pas ses objectifs. Le livre sur l'instructeur serait écrit et la traduction faite. Quand il rentrait chez lui et qu'il ouvrait sa boite aux lettres ou qu'il regardait sous sa porte, il ne trouvait rien de répréhensible. Mais, il le savait, cela viendrait.

Interrogeant un jour Daphne sur la culture de son père, il reçut cette réponse triomphale :

-Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi cultivé que lui ! Les littératures grecques et romaines n'ont aucun secret pour lui !

-Il a d'autres centres d'intérêt ?

-L'équitation je te l'ai dit.

-Et les dictatures ?

-Mais certainement pas ! Il aime l'histoire, ça, c'est sûr.

-Il ne soutient pas que toute critique sur un régime dictatorial est infondé. Il y a une logique en tout, une race est forcément supérieure à une autre, une grande partie de la population n'est faite que pour être soumise et travailler, une autre est constituée de parasites...

-Mais d'où cela sort-il ? Mon père t'a reçu chez lui !

-Il ne te dit pas tout de lui-même.

-Pourquoi écrirait-il des choses pareilles ! Je ne prends pas ça au sérieux !

-Admettons. Et ta mère ?

-Elle aime la musique et les livres. Qu'est-ce que tu veux savoir ?

-Rien, ma chérie.

Paul préféra changer de sujet ; il ne voulait pas que Daphne s'étonne de son questionnement. Il avait très sûr d'elle, il l'était moins. Disait-elle bien tout ce qu'elle savait ? Il préféra revenir à son roman.

-« La Dérive de Tom ? » n'est pas un titre accrocheur !

-C'est mon roman, Paul.

-Fais comme tu veux.

-Non, propose.

- « Une larme de rhum dans mon thé ». Je te l'ai déjà dit. Toutes ces dames âgées ont cette faiblesse. Ça suscitera l'intérêt, je t 'assure.

-Oui, d'accord. C'est drôle en plus !

Il lui sourit. Le roman était bouclé mais ils firent encore des corrections, Paul insistant lourdement pour qu'elles se fassent. Le manuscrit fut envoyé. En attendant l'impression du texte, Daphne se préoccupa de l'avancement des travaux de la librairie dont elle voulait être la reine. Ce ne serait pas seulement un espace de lecture où on pourrait acheter des ouvrages et entendre des auteurs s'exprimer, ce serait aussi une petite salle de spectacle et un restaurant salon de thé  Une si jeune femme à la tête d'un pareil édifice, cela était surprenant si on méconnaissait la fortune des Brixton et leur ambition. Si on la connaissait, tout coulait de source. Quand les livres emplirent les rayonnages et que la décoration du restaurant et de la salle de spectacle furent terminées, ils furent ravis. Elle, plus que lui. Du premier étage, on avait une vue splendide sur les rues environnantes et Paul qui s'en émerveillait fut soudain perplexe. Il était aussi facile d'observer les passants d'en haut qu'à ceux-ci de vous guetter. Rien n'avait d'importance pour l'instant mais le vernissage approchait. Il y aurait beaucoup de monde. Et en effet, la fête quand eut lieu attira des kyrielles d'invités. On photographia beaucoup la reine des lieux et on l'interviewa. Paul était au premier étage quand il aperçut dans la rue un long jeune blond et un autre, plus massif et très brun. Ils bavardaient entre eux avec animation, indifférents semble t'il à cet événement dont ils ne savaient rien. Toutefois, Paul ne fut pas dupe. Le jeune homme blond leva la tête et le regarda sans sourire. Tout était très clair. C'était le cavalier blond. Il le fixait mais Paul ne baissa pas les yeux. L'échange dura quelques secondes puis l'inconnu vêtu de noir fit un signe de la main, comme pour saluer. Comme pour mettre fin à son trouble, la voix de sa jeune amante le fit revenir à la réalité.Le temps que Paul se retourne, l'inconnu blond avait disparu avec son comparse.

-Je te cherche.

Daphne était dans son dos et ses parents la suivaient.

-Père trouve que tu as eu raison pour le titre de mon roman. Il est drôle et percutant.

Lord Brixton était souriant mais son regard était froid. Celui de sa femme aussi.

-C'est une fête magnifique !

-Oui, Daphne.

En rentrant chez lui, après le vernissage, Paul s'attendit à trouver un nouveau courrier anonyme. Il n'y en avait pas. Daphne, la librairie, les deux jeunes hommes, ce pouvait être une diversion. Il ne touchait pas au livre sur l'Instructeur et laissait en plan ses projets de traduction. Il cédait en fait. Sur une feuille de papier, il écrivit à l'encre noire :

Vous pensez gagner ?

Il alla se faire un café et ne revint dans sa chambre qu'une heure après. Il y a un message à l'encre rouge sur la feuille.

 Évidemment. Tu as embrassé mes bottes.

Çà laisse des traces...

Alors qu'il restait sans mot dire, Lisbeth appela.

-Je viens à Londres. Ma vie change. Je vais y travailler.

-Comment cela ?

-Je fais des rêves étranges.

-Quel genre de rêves ?

-Ils te concernent. Tu erres dans un labyrinthe, tu te noies...Des images oniriques violentes mais pour moi alarmantes. Il n'est pas bon que tu sois seul. Je me trompe ?

-Peut-être pas...

-Tu vois. Qu'est-ce qui t'inquiète ?

-Ma rééducation. Trop de souvenirs. Je me sens comme hanté.

-J'arrive.

-Tu me prends au sérieux ?

-N'en doute pas. Je sais de quoi ils sont capables.

Le roman de Daphne parut, se vendit bien et plut à la critique. Pour elle, c'était une phase heureuse. Pour Paul aussi. Mais une guerre commençait et bientôt, il ne sourirait plus.

 

 

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