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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
18 avril 2024

Battles. Partie 2. Des écrits sur la prison Etoile.

 

Mis en confiance son succès éditorial, Paul reprit le court mémoire qu'il avait écrit sur son incarcération à Étoile alors qu'il était en Suède. Il l'avait d'abord conçu comme un texte à orientation documentaire et il choisit la troisième personne. Toutefois, conscient qu'il élargissait son propos en parlant du système carcéral en général et des spécificités de la prison Étoile en particulier, il voulut frapper plus fort en l'écrivant à la première personne. Ce serait une peinture cruelle mais juste de ce qu'entraîne la privation de la liberté et l'absence de tous droits sociaux et surtout, ce serait son ressenti. Paul fut très précis sur les brimades rencontrées lors de son arrivée, le passage par différents ateliers où le travail donné n'avait aucun sens et ce qu'on lui avait demandé de faire, une fois qu'il avait été rééduqué. Il évoqua ces cours dispensés à des femmes dociles pour que le documentaire tourné sur elles « fasse » vrai mais il fut très théorique pour ce qui était de sa transformation et du rôle des instructeurs. On comprendrait qu'il avait été frappé, drogué aux médicaments et contraint de se plier à la doctrine du chef...

Ce texte court, d'environ cent pages fut publié par le même éditeur qui avait tenu à ce qu'il soit très percutant. C'était une charge. Quand il parut, il fut cette fois très commenté. Intitulé « Face à ceux qui détruisent », il eut davantage de succès. Cette fois, l'exposition médiatique de Paul augmenta.

La presse titrait :

-Un texte bref mais fort sur une prison qui tient ses promesses ! A lire d'urgence pour en savoir plus sur la prison Étoile !

-Voyage au pays de la tyrannie. Le récit haletant de Paul Barne !

-Paul Barne et l 'Ambranie : le récit tant attendu de son emprisonnement.

-De la résistance à la prison politique : voyage en enfer...

 

Les journaux à grand tirage parlaient de lui et il accepta de participer à une émission littéraire, à la radio, il est vrai...A l'école de journalisme où il enseignait toujours, ses cours, déjà recherchés, furent littéralement pris d'assaut et on lui offrit même une chronique dans un hebdomadaire anglais, qu'il accepta. A partir de là, il n'était pas difficile de comprendre qu'on chercherait davantage à savoir qui il était. On découvrirait où et pour qui il travaillait, quel était son statut marital et quelle femme il fréquentait... On trouva des photos de lui à des âges divers et sur internet, elles furent faciles à contempler. Encore tout jeune, il était à Berlin ou à Londres pour ses études et souriait, dans le bel élan de sa jeunesse. Il était enfant et posait à Dannick avec son père. Dieu du ciel ! Où avait-on déniché cette photo ! Ainsi que celle où il posait avec ses frères ! Tiens, sa mère était au piano et c'était il y a si longtemps ! Et là, il était avec sa femme quand tout allait encore bien. Quelques fanatiques de son œuvre pourtant réduite faisaient des photos sur You Tube et les commentaires fusaient. Dans certains cas, on commençait à lui faire dire ce qu'il ne disait pas...En des temps où tout passe par l'image et la surexposition, les réticences de Paul à se montrer et à s'exprimer en dehors de l'espace de ses livres, parurent très séduisantes. Il se promit de ne pas céder puis le fit et commença à le regretter. Sachant que s'il ne publiait pas avant un bon moment, l'intérêt qu'il avait suscité retomberait, il pensa au texte qui complétait la trilogie. Il avait eu du mal à l'écrire et savait de toute façon qu'il lui faudrait l'améliorer. Il avait bien parlé de rééducation mais peu des rééducateurs et surtout très mal du sien. Ce livre qui parlait de lui tel qu'il était. Le mettre à jour n'était pas si compliqué. Cependant, au bout de deux tentatives, Paul s'arrêta. Ses pressentiments négatifs se consolidaient.  La dictature de Dormnan, malgré les sanctions prises, ne s'effondrait pas. Les arrestations n'étaient moins nombreuses que parce qu'elles n'étaient pas faites de la même manière. Et puis, un dictateur a toujours des soutiens solides et ici même, en Angleterre, celui-là en avait. Et des voix s'élevaient désormais pour dire que Paul affabulait.  Ces exactions ? Cette prison ? Ah oui certes, on ne laissait pas tout faire en Ambranie mais il fallait avoir un esprit bien enfiévré pour décrire sa patrie de cette façon. Rééduquer et non tuer ? Était-ce vraiment contestable ? Des témoignages radicalement opposés à celui fourni par les opuscules de Paul Kavan pouvaient se trouver...

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