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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
30 mars 2021

Les Disparus. Guillaume. Au Canada ?

gg

Malgré cela, bien sûr, je ne cesse de m'interroger. 

J'ai mis longtemps à comprendre qu'il n'est pas resté en Espagne. Il a du émigrer. Il aimait parler anglais. Pourquoi pas le Canada ? C'était un touche à tout. Il avait l'esprit agile et il apprenait vite. Il a du rester  longtemps caché je ne sais où. Qui sait s'il n'a pas appris un nouveau métier ? Oui, il l'a fait. Quelque chose de pratique qui le débarrassait de son étiquette de rêveur et d'artiste à qui il ne fallait pas trop en demander. Je suis sûre qu'il est parti à l'opposé de ce qu'il était.  Souvent je l'imagine au Québec mais je peine à lui inventer une vie à sa mesure. Trop attendu. Trop en lien avec la France...Non,ce n'est pas cela. Près de Vancouver, ils s'occupent d'un refuge animalier, est une sorte de ranger ou encore promène des touristes. Il a peut-être toujours le même nom, vit correctement et cultive une douce amnésie qui le rend charmant aux yeux de tous. Si une partie de lui lui rappelle qu'un temps il vivait en France dans le sud-ouest, avait une compagne et deux filles, une autre lui enjoint de se concentrer sur ce qu'il est maintenant. Un français immigré bien intégré, fiable et correct. Et qui plus est, un homme séduisant qui a plus d'une corde à son arc. Il excelle à la guitare, joue plutôt bien du piano, ne déteste pas séduire une femme, lève le coude avec modération et se montre souvent d'humeur fringante. Le Canada lui plaît. Il n'irait pas ailleurs.

 Ce ne sont que des suppositions, des rêveries mais je sais au fond, que j'ai raison. Quand il nous a quittés, il avait trente cinq ans, un peu tard pour continuer de dessiner sa vie à grands coups de crayon pour en gommer ensuite la plus grande partie. Il était temps de prendre un train qui ne le ramènerait pas à la case départ car il en descendrait avant. Il était temps d'être regardé par d'autres yeux et de se sentir autre.

Je ne pense pas qu'il ait été insensible à la détresse dans laquelle sa fuite nous plongerait. Nous avons immensément souffert par lui et il ne l'a pas ignoré. Mais très vite, il a su que s'il restait, ce serait pire. Il n'avait jamais été violent. Il le serait peut être devenu pour échapper à cette vie étriquée que nous lui faisions mener...En somme, il a répondu à une urgence. Il est parti pour être lui. Et je suis sûre et certaine qu'il s'est rencontré lui-même, qu'il est plutôt content. 

Les photos sont là. Je les regarde. Mon père au beau visage et aux yeux clairs. 

Cette perte, j'en souffre mais elle me nourrit malgré tout.

Je ne suis pas encore moi-même. La musique est peut être une clé. Ou non.

Qui sait ce que je ferai ?

 

 

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