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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
partie 4 immense prison etoile. paul et esmed.
12 mars 2024

Battles. Partie 4. Etoile. Les vestiges d'une vie carcérale.

 

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A Étoile, les distances étaient vite importantes et Paul avait demandé à avoir une vue d'ensemble. Son gardien, un certain Maval Ersend le promena dans toute la parte émergée de la prison, là où se trouvaient les multiples ateliers de travail mais aussi les logements des personnels subalternes et les entrepôts. Il y avait des structures hospitalières réservées aux travailleurs extérieurs à la prison. De temps à autre, Paul demandait à descendre et le gardien le guidait alors dans un dédale de salles et de couloirs. La plupart des machines étaient encore en place mais il manquait le bruit qu'elles produisaient ainsi que le bourdonnement des voix des contremaîtres et des gardiens. L'hôpital était encore tout équipé et il en allait de même de l'infirmerie. Quant aux petits logements des gardiens, dont certains y vivaient en famille, ils étaient exigus et déprimants. Le guide conduisit ensuite Paul au centre de l’étoile . C'était une immense place vide, nantie de statues grandiloquentes que nul n'avait fait disparaître. On y faisait des défilés, des parades. Ceux qui étaient des travailleurs libres pouvaient s'y réunir : concerts, discours. Il y avait un aérodrome et ses dépendances.

-C'est énorme ! On a fini ?

-Le reste est sous terre.

-Quoi ?

-Il faut prendre des ascenseurs.

-Mais ...

-On y va.

Ils firent comme Paul avait dit. Ersend les guidait, allumant les néons au fur et à mesure. Un dédale de couloirs et de salles s'ouvrait.

-Là se trouvaient toutes les instances administratives. Là siégeait le directeur de la prison et ses adjoints.

-Ce n'est pas dégradé.

-Non, monsieur Barne, c'est en bon état.

 Ils poursuivaient.

-On enregistrait les admissions ici  et là, on effectuait un tri. Diverses salles.

Esmed était confondu.

-Quel tri ?

-Les prisonniers de base, dans différentes branches de l'étoile, les politiques, cas rares à rééduquer dans une branche spéciale, bien équipée. J'imagine que vous savez cela, monsieur Kavan.

-Oui mais j'étais privé de vision. On m'a enlevé mon bandeau quand j'étais dans une sorte d'infirmerie.

Ils virent d'autres salles. C'étaient celles où où on écrivait des lettres factices qui, dès l'incarcération du prisonnier, rassuraient de loin en loin les familles jusqu'à ce que tombe un édifiant silence puis celles où on enregistrait les décès pour une comptabilité qui ne concernait que la prison. Les armoires regorgeaient encore de dossiers, la mémoire des ordinateurs n'avait pas été vidée et d'immenses organigrammes étaient affichés sur les murs.

-Vous avez l'impression que tout est là, lui dit le petit guide, mais c'est faux. Plus de la moitié des documents a été transférée à Dannick et bientôt, le reste suivra.

-La prison est fermée depuis trois ans.

-C'est la date officielle, oui. Elle s'était déjà vidée un peu avant mais ça a été compliqué...

-Oui, je me doute.

Esmed était livide et il fermait les poings.

-Tu vas bien ?

-Oui.

-C'est difficile pour toi.

-Et pas pour toi ?

-C'est un constat terrifiant.

Il fallait poursuivre. Les couloirs se succédaient. Il fallait prendre des ascenseurs.

-Nous touchons à l'aile directoriale.

-Ah oui !

Le bureau du directeur n'avait plus son mobilier mais dans d'autres, il était intact. Le réseau informatique était partiellement désactivée et dans beaucoup de salles réservées aux réunions de travail et au délassement des administratifs, il était inopérant, mais pas dans toutes. Il existait donc bien encore une mémoire vivante, un fichage...

-Vous ne pouvez pas toucher aux appareils ici, mais monsieur Alstrohm, qui va vous recevoir ensuite, vous donnera accès à certaines données...

-C'est très bien comme ça.

Paul tourna longuement dans les couloirs et les bureaux puis fit un signe de tête. Il en avait terminé. Esmed, qui ne disait plus rien, redevint questionneur.

-Tu savais tout cela ?

-Non, pas tout.

-Pourquoi ?

 Je n'étais qu'un détenu. On me droguait et me battait.

-Alors de quoi t'es-tu rendu compte ?

-L'immensité, les catégories de prisonniers, le fait que certains disparaissaient, la violence...

C'était maintenant le jeune pianiste qui était le plus pâle. Ersend le conduisit cette fois dans la zone des appartements privés des gradés de la prison. Les directeurs y avaient vécu là, en famille mais aussi certains privilégiés, dont les instructeurs de première classe les plus méritants. Une bonne partie du mobilier avait disparu mais ce qui restait donnait une idée de la vie confortable et facile qu'on avait pu mener là, tandis que bon nombre de prisonniers s'entassaient dans des dortoirs rudimentaires et mal chauffés.

-Qui logeait ici ?

-Le directeur avec sa famille, le sous directeur, deux ou trois administratifs de haut niveau et les instructeurs de première classe. Ils n'avaient pas droit à des logements aussi beaux mais tout de même !

-Montrez-les moi...

Le dernier directeur en date avait vécu là avec son épouse et leurs deux enfants. Tout le confort avait été mis à leur disposition. Il était aisé de le voir même si les meubles étaient poussés contre le mur et recouverts de housses blanches. Pièces aux belles dimensions, salles de bain bien agencées...

-La vie de château...

-Pour eux, oui, Esmed.

-J'ai envie de vomir.

-Respire.

A son guide, Paul demanda :

-Est-il possible de visiter les logements des instructeurs ?

-Oui, suivez-moi.

Ils avancèrent.

 

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