George D. Celui qui meurt. Partie 1. Aimer encore pour ne pas mourir.
16 George. Roquebrune. Janvier 2016. Sur la Côte d'Azur où il s'est réfugié car il est aux abois, George D. rencontre des jeunes gens. Il aurait un amour possible...
Vers quatre heures du matin, je n'y ai plus tenu. Je me suis succinctement habillé et me suis présenté à sa porte. Je ne sais pourquoi j'avais imaginé qu'il se serait barricadé comme un petit enfant à qui on demande de n'ouvrir à personne en l'absence de ses parents. Il n'en était rien. Je suis entré sans encombre dans une pièce pleine de pénombre mais non obscure et ai refermé la porte à clé. Il dormait à poings fermés. Je me suis dénudé et ai ouvert les draps. Il avait une belle respiration régulière et je l'ai écouté sans bouger, allongé près de lui. Puis, je l'ai attiré à moi avec suffisamment d'élan pour qu'il se réveille.
-Qu'est-ce que tu fais !
-Mais tu le sais !
Il s'est joliment débattu et je n'ai pu utiliser que le biais de la parole puisque fort et jeune comme il l'était, je n'aurais pu le contrer.
-Je t'en prie. On se sépare tous bientôt. Je t’ai dit qui j'étais, tu m'inspires, tu me rends à la vie. Mon Erik....
Il a dit non faiblement et s'est encore un peu défendu, ce qui m'a permis d'évaluer le peu de difficultés qu'il y avait à le déshabiller. Que voulez-vous, j'ai été mal habitué. Elles s'offraient, ils s'offraient. C'en était dérisoire. Forcément, une telle jeunesse et une beauté inattendue pour moi, ça m'excitait. Il a détourné la tête quand j'ai voulu l'embrasser et a repoussé mes mains qui cherchaient à lui retirer ses vêtements avant de céder et de s'allonger. J'ignorais à quelle injonction il obéissait mais celle-ci m'a bien servi. J'ai pu le mettre nu, entrer ma langue dans sa bouche et enserrer son membre dans une de mes mains. Il avait un corps ferme, musclé mais fin et ce visage…
Trois heures d’affilée, je ne l'ai pas laissé tranquille. Il répondait bien, en bel amant qu'il était. Aucun de nous ne parlait sauf pour des consignes brèves. Je lui en demandais beaucoup puisqu'il n'y avait pas vingt-quatre heures qu'il avait fait l'amour à cette jeune fille mais j'étais étonné de sa fraîcheur et de son inventivité. Quand enfin mon désir a décru, je me suis écarté de lui et il est resté un moment calme et silencieux, allongé, sa respiration allant s'apaisant. Il fermait les yeux et avait l'air profondément comblé. Je me gorgeais de ses odeurs corporelles car elles étaient celles d'un jeune homme au fait de sa beauté. Il a soudain voulu se lever et je l'ai retenu durement par le poignet :
-Mais où vas-tu ?
-Dans la salle de bain !
-Tu as gardé les odeurs de cette fille et tu as les miennes maintenant. Est-ce que ça t’enivre ?
-Je ne me suis pas posé la question.
-Tu veux tout de même t’en débarrasser…
-C’est mal ?
-Oui, parce que moi je trouve cela très excitant.
Il a eu l’air stupéfait comme si ma remarque était sans fondement. Je ne décolérais pas.
-Quoi, il est si puritain ? Jamais ce genre de remarques ?
-Il s’économise en paroles si je le compare à toi et de toute façon, la situation ne s’est pas trouvée. Tu vas rester aussi possessif ?
Je le déconcertais trop et il fallait calmer le jeu. Me reprenant, je l’ai laissé filer dans la salle d’eau.
-Non, rassure-toi, non…
Je me suis surpris à chantonner.
Ce sont ceux qui résistent
Que nous avons le plus envie d'embrasser,
Tu es d'accord ?
Les cow-boys et les anges,
Ils ont tout leur temps pour toi
Comment pourrais-je croire
Être une perle rare pour toi ?
Pourquoi les paroles d'une de mes chansons me revenaient-elles en mémoire ? Je me suis surpris à la fredonner. Il me regardait, étonné, en s'essuyant avec une grande serviette blanche et je voyais son agressivité s’en aller. Je me suis levé pour l'aider à se sécher et j'ai continué de chanter.
Les cow-boys et les anges,
Ils t'aiment tous instantanément
Comment pourrais-je croire
Avoir été fait pour toi ?
Comment pourrais-je croire
Que tu resterais ?
Mais la cicatrice sur ton visage,
Ce magnifique visage qui est le tien...
Ne crois-tu pas que je sais
Qu'ils t'ont déjà blessée auparavant ?
Il ne disait rien et se laissait cajoler. Je l'ai fait se recoucher. Il restait silencieux mais me regardait avec ces mêmes grands yeux pleins d'enfance qu’A avait eus. J'ai été traversé par une souffrance violente mêlée de bonheur.
-S'il te plaît, sois plus fort que ton passé ! L'avenir pourrait bien te donner une autre chance. C'est ça la fin, non ?
Il l'avait murmurée dans ce joli anglais qu'il avait mâtiné d'une pointe d'accent danois. J'ai voulu lui répondre mais j'étais si fortement ému que je me suis tu.
-Mais tu sais le texte de cette chanson ?
-Tu vois bien.
-Erik, écoute, je…
-Non, les paroles que tu vas dire…
-Tu devras les entendre.
-Pas maintenant, je vais dormir. J'ai vraiment sommeil.