ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 2. Jeux étranges.
Isée, jeune enseignante, et Phillip, Américain aisé en vacances à Paris. Jeux étranges et érotisme.
-Mais vous, Phillip, que me direz-vous de votre vie ?
-Mon roman va sortir en librairie. J’ai repris en main la galerie et je m’occupe de Vincent. On a une belle relation…Il est difficile de s’ennuyer avec lui !
-Vous êtes heureux ?
-Le bonheur est un état difficile ; « Heureux », si tant que la félicité m’envahit chaque jour, l’espace de quelques minutes, je le suis…Mais revenons à vous.
A l’évidence, il se cachait, comme il l’avait fait au début avec moi. Les échanges que j’avais eus à sa place avec son jeune compagnon lointain semblaient bien être les seuls où il s’était dévoilé. Enfin, jusqu’à maintenant…
Il revint sur ce que je devais vivre mais je différais le moment de lui donner les quelques mots qui serviraient de cadre à la première de mes aventure. Je lui proposai « Nuit, boite de jazz » et homme solitaire » qui ne lui plut qu’à demi. « Jazz » notamment le mettait mal à l’aise car il y voyait une allusion à Vincent. Celui-ci jouait et écrivait une musique sophistiquée que je n’avais pas en tête. Je pensais, moi, au caveau de la Huchette où Morgane tenait à ce que nous allions danser. La musique qui y était jouée était plus dansante, moins aérienne et surtout moins alambiquée que celle qu’interprétaient le beau trompettiste et son groupe. Je lui expliquai et il céda. Le soir dit, je filai chez mon amie qui avait un logement plus grand dans le neuvième et de là nous nous rendîmes en taxi dans la fameuse boite. Je me souviens d’une atmosphère très enfumée, d’une foule dense et cosmopolite de plusieurs fous-rires. Je me souviens aussi d’un couac retentissant. Je repérai un homme seul, la quarantaine, pas vraiment beau mais non sans charme et il me fit comprendre par force sourires et œillades que je ne l’indifférai pas. Je dansai longuement avec lui et constatai que mon amie Morgane avait elle-aussi trouvé un cavalier solitaire, nettement plus jeune que le mien. Tout se présentait bien. Nous nous retrouvâmes tous les quatre, attablés au bar, où je continuai ma consommation de vodka orange. Les deux hommes étaient pressants et nous très souriantes ; Mais quand il fut décidé de quitter la boite, mon cavalier s’avéra être un médecin en stage à Paris logé dans un hôtel assez proche mais il lui semblait impossible de recevoir quelqu’un. Il me restait à l’inviter chez moi mais comme je m’apprêtais à le faire, le visage de Zacharie s’interposa. Non, tout de même. Je n’étais ni si en colère ni si dépitée que je traîne un type chez moi pour avoir une histoire à raconter. Le médecin insista si lourdement du reste, que ma décision, qui aurait pu vaciller, devint certaine. Morgane n’avait pas mes problèmes et elle pouvait fort bien recevoir cet amant passager. Par « solidarité féminine », elle refusa de le faire, ce qui me laissa totalement perplexe avant de me faire mourir de rire. Je dormis chez elle et nous passâmes une matinée charmante, à babiller comme des petites filles. Restait l’étape finale : écrire un petit récit. Je me donnais le beau rôle et fis dans l’ironie. J’avoue que je ne m’appesantis pas trop sur mon texte et que je l’envoyai sans état d’âme. Dire que Phillip le trouva bon, serait mentir. Je ne devais pas céder à la facilité car j’étais une héroïne non la journaliste rédigeant à la hâte un petit récit pour un numéro « spécial plage » d’un magazine féminin.