ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 2. Amours violentes.
Liée à l'Américain Phillip Hammer, Isée est très influencée par lui. Elle a connu peu d'hommes et doit y remédier.
En novembre, je décidai de programmer une nouvelle aventure. Je prenais plaisir à faire l’amour avec des inconnus, je ne pouvais le nier et je me lançai dans la bataille, sachant que je ne voulais pas, cette fois, d’une aventure à la tristesse acidulée.
Iban était un père de famille basque (ça ne s’invente pas) qui avait surtout envie de me raconter sa vie. Il était gentiment marié et père de famille et jusqu’ici, tout était allé plutôt bien. Seulement, sa femme était toute retournée par l’un de ses frères qui était prêtre et ne voulait plus l’être. C’est qu’ils étaient plus ou moins catholiques dans sa famille et cette entorse à la religion, soudain…Lui, encore, il pouvait comprendre mais sa femme, alors. Au lit avec cet homme qui n’était pas allé par quatre chemins pour me faire des propositions, je fus surprise qu’une fois sa fougue tarie, il me prit comme confidente. A la fin de la nuit, j’aurais pu aller à Biarritz et trouver sa maison les yeux fermés tant il m’avait donné de détails sur elle. J’aurais aussi reconnu ses enfants dans la rue…
Écrire sur ce basque me fit beaucoup rire. Je donnai de moi une image naïve sans être ridicule. Pauvre Isée, nue dans un lit, à côté d’un homme qui ne l’honorait pas mais lui racontait sa vie et l’empêchait de dormir…Je ris de moi mais modérément. Iban était un brave type et certainement pas un coureur mais il n’avait pas fait preuve d’une grande finesse d’esprit. Le texte que j’écrivis était léger et drôle. Il n’était pas excellent mais Phillip eut l’élégance de ne pas me le faire remarquer. Il nota tout de même que je venais de vivre quatre expériences très différentes qui m’avaient donné du plaisir tout en me faisant éprouver de la jalousie ou du dépit. Pour lui, cela suffisait. Il était satisfait. Je passai outre néanmoins. Pourquoi ? Parce que je n’imaginai pas du tout que je puisse me heurter à une réalité difficile. Je ne pourrai indéfiniment jouer au jeu de « mes petits récits » mais je pouvais tout de même les conclure par une note différente. Je décidai donc que j’aurais une aventure haute en couleur et mouvementée avec un touriste espagnol ou latino qui cacherait bien son jeu. Phillip accepta mais je ne le sentis pas enthousiaste. C’était à moi de lui montrer qu’il avait tort !
Comme novembre finissait, je rencontrai un samedi soir un Andalou en goguette qui voulait s’amuser à Paris. Je buvais seule une eau gazeuse dans un café situé près de mon école quand il se mit à me parler dans un anglais approximatif. Il me trouvait jolie. Nous échangeâmes nos numéros et je trouvai cela bête à pleurer. Il était beau garçon, ça, je devais le reconnaître mais pour ce qui est de l’amour physique, ses conceptions n’étaient pas les miennes. L’ayant rejoint dans son hôtel, il me servit copieusement à boire de telle façon que la tête me tourna. Il se jeta littéralement sur moi et cessant de parler son pauvre anglais horriblement accentué, passa à l’espagnol tel qu’on le prononçait en Andalousie et se mit à m’insulter. Il suffisait de voir la colère tordre son visage pour se douter de ce qu’il disait, même si ses propos m’échappaient. Il me frappa avant et après m’avoir prise et ceci à plusieurs reprises. Pour Iban, j’avais écrit : « père de famille, bienveillance, soucis » et pour ce Guillermo que j’avais pensé rencontrer « le soleil et la passion ». Je m’en voulus vraiment d’avoir utilisé des mots fantaisistes qui allaient, sans que je puisse m’en douter, recouvrir une réalité cruelle. Mais Phillip, quand il apprit ma mésaventure, fut consternée. Je n’avais pu quitter l’hôtel qu’à l’aube car j’étais entravée et j’avais des marques sur le corps et au visage. J’avais vu un médecin qui n’avait pas été dupe mais m’avait donné un arrêt de travail assez long, histoire que mon visage redevienne présentable. Hammer me donna un rendez-vous pour que nous puissions nous parler sur Skype. Il ne l’avait jamais fait ; quand il me vit sur l’écran, il réprima un haut le corps. Que j’aie des aventures diverses qui donnaient naissance à des textes singuliers lui plaisait mais non que je sois battue.
-Vous avez mal ?
-Non, ça va.
Il parlait un français impeccable.
-Vous avez porté plainte ?
-Mais non ! Qu’est-ce que j’aurais raconté ?
-Ce qu’il y a eu.
-Je ne peux pas faire ça.
-Je comprends. Je suis désolé.
-Moi-aussi.
Il ne put s’empêcher de sourire mais je le sentais plein d’attention.
-Vous n’avez pas pu deviner qu’il deviendrait violent ?
-On a pas mal bu et il a pris des cachets. C’est cela, je crois…Il s’est transformé brusquement…