ISEE ET LES DEUX VISAGES. Partie 2. Une invitation merveilleuse.
Une complicité ambigue unit la jeune Isée, enseignante, et l'Américain Phillip Hammer. Celui-ci, retournant aux Etats-Unis, l'invite...
Hammer était superbe, brun, le bel ovale de son visage, le v de son pull-over et ses yeux qui brillaient. Je n’avais ressenti aussi fort la séduction que cet homme pouvait dégager.
-C’est de ma faute, je crois. Je m’excuse vraiment…
-De votre faute ?
-Oui. Ce que vous avez écrit m’a fasciné. Vous sembliez avoir un pouvoir sur les événements. Il ne suffit pas de dire qu’on veut vivre ceci ou cela pour tout se passe comme on le souhaite mais vous, on aurait dit que vous influenciez le futur pour qu’il se conforme à vos souhaits. Tout vous a souri jusqu’à cette mauvaise rencontre. Ce n’était pas une histoire pour vous.
Je ne voulais pas aborder davantage ce sujet douloureux. Une fois de plus, je tentai de le faire parler de lui…
-Vous en avez des aventures, vous ?
-Oui.
-Et ce n’est pas pareil ?
-Non.
-Pourquoi ?
-Il m’arrive de payer. Ce sont des professionnels ou des jeunes qui se mettent dans un réseau parce que l’argent est facile. Tout est très encadré et de toute façon, c’est vraiment de temps en temps. Je pourrais coucher avec le jeune peintre ou le jeune sculpteur qui veut que j’expose son œuvre mais que je veuille ou pas mettre son travail en valeur, c’est trop compliqué ensuite. Alors, de ce côté-là, je ne fais rien.
-Et Vincent ?
-Se heurter à la violence lui est arrivé deux fois mais c’était il y a longtemps. La deuxième fois, il a été frappé fort, plus fort que vous et il a eu peur. Le type voulait l’étrangler. Il a réussi à s’échapper…Il est beaucoup plus calme avec les aventures maintenant et de toute façon, il ne pense qu’à la musique.
-Mais il est quand même jaloux. Il est de chair.
-Je vous l’ai dit ; les aventures que j’ai sont très espacées. C’est d’autre chose qu’il est jaloux. J’ai une bonne position sociale avec cette galerie qui marche très bien.
-Et les filles ?
Il eut un rire embarrassé.
-Il y a ce problème avec lui. Elles lui plaisent, c'est sûr...
J’explosai tout d’un coup.
-C’est trop terrible, trop limité, trop réel, tout cela…Je me sens veuve.
-Comment cela ?
-Veuve de tous ces espoirs, de toute cette gaîté. Le Basque, c’était drôle, les autres, c’était surprenant et…
-Votre dernière rencontre était violente. Sur celle-ci, il ne peut y avoir de texte. Mais les autres ont été bons. Vous vous êtes mise en scène de belle manière.
-Non, non…
Il fit un geste de la main pour m’apaiser car je pleurai.
-Que vous arrive-t-il ?
-Est-ce vous qui présumez trop de moi ?
-Non, je vous vois telle que vous êtes et je vous estime. Vous êtes si différente…
-Mais qu’est-ce ça veut dire ? Hein ?
-Calmez-vous. Vous êtes une jolie jeune femme. Le garçon du Montana vous contacte toujours ?
-Oui.
-Il vous invite à aller le voir ?
-Oui.
-Vous voyez !
-Et New York ? Vous voulez venir en vacances ?
-J’aimerais.
Je le vis hocher la tête.
-Venir deux semaines, vous pouvez. On travaille dur tous les deux mais on s’occupera de vous. Mais c’est plutôt…
-Plutôt ?
-Votre vie à Paris. Voulez-vous la poursuivre ?
-Pas toujours.
-C’est cela qu’il faut savoir. Vous parlez bien anglais et vous êtes invités par deux Américains. Pardon, trois…Vincent sera d’accord.
-Que sait- il de moi ?
-Vous m’avez donné des cours et vous êtes sympathique, c’est tout.
Je crois que mes yeux brillaient à travers mes larmes.
-L’Amérique pour autre chose que des vacances, vous y penserez, Isée ?
-Oui.