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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
17 octobre 2024

Clive le Vengeur. Partie 1. Mais quel est le sens de ce message ?

 

Bon…Il y avait de quoi être vraiment intrigué. C'était une vengeance bien pensée. Le type devait ronger son frein mais il semblait sûr de son coup : ça marcherait. Il le trouverait, son bras vengeur...Mais tout de même ! Il avait fait quoi le « jeune homme » pour être « fautif » ? Il avait partouzé sans convier l’amant en titre ? Il avait pris la poudre d’escampette avec un autre ? Il ne voulait pas revenir parce qu’il ne supportait plus son compagnon ? Oui, ça devrait être ça. Il avait fichu le camp et l’autre n’en démordait pas : c’était toujours sa proie. Il la voulait. Et il demandait à quelqu’un d’autre de la capturer. C'était bien pervers déjà, mais si on poussait le raisonnement, c'était encore plus tordu que prévu. Il pouvait vouloir qu'on la lui retourne après s'être servi d'elle et l'avoir bien humiliée, la proie en question ! Retors, l’amant en titre, vraiment pas commode. Et l’autre ? L’air, la terre…Où voulait-il en venir ? Faire mordre la poussière à quelqu’un qui était dans un autre élément, c’était bien cela la demande ? Histoire que l’autre arrête de se dire qu’il a des ailes…Histoire qu’il revienne devant son maître, son juge, son commandeur ? Si c’était cela, ça ne donnait pas au candidat heureusement sélectionné par l’auteur de l’annonce un rôle très sympathique. Ça revenait à être un rabatteur. Bon, c’était plutôt vil mais en même temps, il fallait reconnaître que c’était alléchant. « La prise est de choix ». C’était bien ce qui était écrit. Si on décodait, ça voulait dire : le jeune homme est beau et ce n’est pas n’importe qui. Au moins, vous serez récompensé de vos efforts.

Voilà un homme qui mettait toutes les chances de son côté pour que soit remis à sa place l’être aimé qui avait failli. Si l’idée était malheureusement banale, la façon d’énoncer les choses était à la fois mystérieuse et galvanisante. J’étais décidé. J’allais répondre. Je fis un premier jet puis un autre et encore un autre et puis je jetai tout. Ecrire que j’étais l’heureux élu à quelqu’un dont j’ignorais tout était idiot et l’était encore plus l’étalage de mes talents de menteur ou ceux d’amant. Je n’étais ni plus rusé ni plus dénué de scrupules que la plupart de ceux qui avaient déjà dû lui répondre et ça ne faisait donc pas de moi le candidat idéal. J’ai donc changé brutalement de tactique. J’ai pris une photo de moi quand j’avais dix-huit ans et que je m’apprêtais, avec cette Kirsten que j’avais complètement perdu de vue, à assister à cette représentation du Lac des cygnes qui hantait ma mémoire. Je l’ai glissé dans l’enveloppe et j’ai joint une photo de moi récente. C’était une photo banale, prise un jour d’été à Central Park et je ressemblais à l’Américain middle class que je suis, c’est-à-dire séduisant sans être beau, sympathique et sain. C’était l’image que je présentais au travail. J’ai décidé de rester laconique dans mon message et je me suis contenté de découper la dernière de ses annonces parues ; je l’ai accompagné d’un numéro de téléphone professionnel et j’ai posté le tout.

Il lui a fallu trois semaines jours pour réagir. C’est bizarre mais je me sentais comme noué pendant tout ce temps-là. Il était impossible pour moi d’être en chasse et je rentrais sagement à la maison. Sa réponse, s’il m’en accordait une, ne se trouverait jamais sur la petite table de l’entrée où Kristin déposait le courrier. Ça aurait dû me soulager. C’est l’effet que ça me faisait d’habitude mais là, ça me stressait. Il y avait dans cette annonce quelque chose d’inhabituel. Qui étaient-ils, ces deux-là ? Me donneraient-ils ma chance ? Car oui, c’est vrai, je ressentais ça comme une chance…Il y avait maintenant deux mois que l’annonce tournait et il fallait compter avec les propositions qu’il recevait et le soin qu’il prenait à les étudier…Enfin, c’était mon idée.

J’ai commencé à déchanter et à m’en vouloir : ces deux photos, là, je voulais lui prouver quoi ? Je me suis mis à faire plein de sport en salle pour me passer les nerfs et Kristin a pris ça pour une sage résolution. J’avais un peu de ventre et je voulais le faire disparaître. Je lui ai dit que oui, c’était pour ça ! On a ri.

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