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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
12 juin 2024

Battles. Partie 1. Paul devant ses juges.

2. Un procès éprouvant.

Paul, qui fait de la résistance sous le nom de Battles, a été arrêté. Son procès commence. L'idée est de le condamner car il trahi sa patrie...

Contrairement à ce qui lui avait été dit, Paul eut droit à un avocat. Celui-ci se présenta à lui quelques temps avant l'audience avec une sacoche qui contenait un maigre dossier. Il avait dû être pressé de prendre la défense d'un client dont le cas était désespéré et fut très évasif. Âgé d'à peine trente ans, cet Anton Bersack exerçait depuis peu. Il subissait une énorme pression.

-Quelle défense préconisez- vous, Maître ? Lui demanda Paul pour la forme.

-L'irresponsabilité.

-Je vous demande pardon ?

-Vous avez été malade très jeune, je l'ai lu. Des troubles mentaux. Je vais demander qu'on tienne compte de votre fragilité.

-C'est risqué.

-J'ai des certificats...

-Ils en auront d'autres. Et puis, je suis solide et me bats depuis des années.

-Je pense que c'est une défense possible. Une certaine irresponsabilité...

-Et ça me fera relaxer ? J'en doute.

-Votre peine pourrait être revue. A la baisse, bien sûr.

-Les circonstances atténuantes...

-Oui, vous devriez bénéficier d'une remise de peine pour bonne conduite.

-Bien. Je serai à Darbard de toute façon.

L'avocat n'en menait pas large, Paul le voyait. Assis en face de lui dans le petit parloir qui servait aux entretiens, il crispait ses mains et baissait les yeux.

-Eh bien ?

-Monsieur Kavan, c'est un procès très politique, vous en avez conscience...Vous seriez à Darbard dans le meilleur des cas, celui que je viens de vous présenter.

-Et dans le pire ? En hôpital psychiatrique ?

-Oui, si vous paraissez trop acharné à vous défendre, trop brillant dans vos réponses, ils pourront choisir cette option.

-Le pire pour moi est le meilleur pour eux ?

L'avocat parut plus mal à l'aise encore.

-Quoi ?

-Je suis votre avocat et ne devrais pas parler ainsi mais il y a des bruits de couloir.

-Je suis irrécupérable. Je suis coupable de tout ce dont on m'accuse. J'ai lutté et parlé contre cette dictature.

-Oui, mais...

Paul devint très pâle. Ce centre de détention dont il n'osait pas imaginer la dureté ni même prononcer le nom, ce pourrait être là qu'on l’incarcérerait ?

-C'est une option possible, vraiment ?

-Je le crains.

-Mais enfin, j'ai fait si peu ! Seulement deux ans ! En quoi pourrais-je leur convenir ?

-Ah ! C'est ennuyeux ! Que répondre ? Écoutez, il faut paraître incohérent. Vous êtes une sorte de fou...

-Ils ne pourraient pas me maintenir à Darbard pour déficience mentale mais l'hôpital. C'est à tenter ?Ils pourraient me suicider là-bas.

-Je suis désolé...A Darbard ou à l'hôpital, il y a le risque que vous soyez  non une victime sacrifiée mais un héros qu'on a muselé.

-Ce que vous dites de mon possible emprisonnement est sujet à caution dans un cas ou un autre. Je n'ai pas tant de soutiens !

-Vous en avez.

Paul blêmit.

-Il resterait Étoile ?  C'est coûteux, non ?

-Oui, ça l'est en un sens mais si vous y allez, vous serez un exemple...

-Ils me rééduqueraient.

Ces rumeurs qui couraient sur ces réhabilitations de dissidents qui, soudain, servaient le régime.

-Oui.

C'était donc vrai. Les bruits étaient fondés.

-Fragilité mentale...

Il fallut se voir et se mettre d'accord. Une condamnation au pénal semblait l'option la moins préjudiciable. Les discussions furent longues et vaines. De toute façon, l’avocat n'était pas de taille, il ne serait pas pris au sérieux. Il était temps de mesurer sa solitude...

Le procès dura bien plus longtemps que Paul ne l'avait imaginé et il fut public. Douze jurés avaient été nommés et ils seraient sommés de condamner ou d'innocenter l'accusé sur lequel pesait un lourd cahier des charges. Dès le premier jour, l’atmosphère fut lourde. Charles Istvan, l'avocat de la partie civile était un ténor du barreau, ce qui risquait de rendre dérisoire la plaidoirie de la défense. Quant aux réponses qu'il ferait aux questions posées, Paul savait qu'elles seraient disséquées avec soin et qu'il devrait redoubler d'adresse. Petit et très laid, le juge Mellieur avait l'air hostile. Il fut direct :

-Monsieur Kavan, vous comparaissez devant ce tribunal comme traître à la patrie. Vous encourez une peine grave. En êtes-vous conscient ?

-Votre Honneur, j'ai défendu la démocratie dans mon pays.

-Ce procès a pour but de démontrer vos erreurs. Vous avez porté atteinte à la sécurité de l'état.

-Non, votre Honneur.

-Nous verrons cela. Maître, c'est à vous.

Charles Istvan, l'avocat de la partie civile, avait des manières rondes mais une voix sifflante. Il attaqua avec férocité.

 

 

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