La visite à Etoile est terminée mais Paul n'est pas libéré pour autant et se montre surprenant.
Il essayait d'être gai mais n'y parvenait pas. Toujours adroite, Magda ne dit rien. Comme il fallait partir, Paul alla placer leurs bagages dans le coffre, de la voiture, leur laissant le champ libre pour finir de se préparer mais bizarrement, il ne revint pas. En refermant le haillon, il avait trouvé au sol une mèche de cheveux blond clair. Surpris, il s'en était saisi. Ses cheveux entre ses doigts, leur douceur, leur lumière...
Magda et Esmed qui avançaient vers lui l'appelèrent sans recevoir de réponse.
-Paul ? Pas trop froid. Paul ?
Puis, ils furent face à lui. Magda resta souriante.
-Vous avez fait une trouvaille ?
-Oh, rien de spécial.
Mal à l'aise, Paul fourra la mèche dans la poche de son manteau et ne dit rien. A priori, Magda n'avait rien remarqué. Ils partirent. Au bout de quelques heures de voyage, il sortit la mèche blonde de sa poche et la contempla. Magda parut surprise.
-Qu'est-ce que c'est, Paul ?
-Ces cheveux étaient par terre. Ce sera une jeune fille qui sera passée là...
-Vraiment ?
-Ils sont beaux, d'une belle couleur. Une fille aux cheveux de lin ? Il y en a bien dans le village. Elle se sera coupé les cheveux devant la voiture ?
-Voilà qui est surprenant...
Paul regardait droit devant lui et tenait fermement la mèche blonde. Quelque chose n'allait pas. Magda jeta un œil dans le rétroviseur. A l'arrière, Esmed était livide.
-D'où viennent ces cheveux ? C'est à toi ? La teinte est la même...
Le jeune homme fit non de la tête. Il avait l'air paniqué.
-Il se passe quelque chose, Paul ?
Celui-ci lui adressa un sourire étrange puis dit d'une voix différente, insinuante et cruelle :
-Les cheveux d'une fille de ce village ? Et moi Paul, j'aurais eu le romantisme de les mettre dans ma poche ! Non, non, ce n'est pas cela ! Ils viennent d'ailleurs et ils sont si précieux ! Plus tard, je pense à un médaillon que je porterai autour de mon cou ou à un talisman dans ma poche...
-Paul ?
Magda était sur le qui-vive. Paul gardait le même ton. Il avait les yeux fous.
-Quoi ? Pourquoi ne les garderais-je pas ? Ne voyez-vous pas qu'ils me rendent fort ?
-Vous n'avez pas votre sens commun, Paul. Honnêtement, ce n'est pas drôle. D'où sortent ces cheveux ?
Toujours très pâle, Esmed prit la parole :
-Il ne vous le dira pas !
-Il a raison. Je ne dirai rien !
Magda était alarmée.
-Qu'est ce qui se passe à la fin ?
-Il ne nous aime pas. C'est pour ça qu'il agit ainsi.
-Tais-toi, Esmed, je t'en prie !
-Non ! Je sais ce que j'ai vu. Je sais qui il est maintenant. Il disait vouloir nous servir, mais regardez ce qu'il fait !
-Je veux que tu te calmes. Laisse moi régler cette affaire.
Magda venait d'arrêter la voiture. Tournée vers Esmed, elle le faisait taire.
-C'est parce que c'est vous, madame Egorff, mais je sais ce que je sais.
Il était hors de lui ; il s'était passé à Étoile quelque chose qui pour lui était insupportable.
Insistante, elle reprit :
-Alors, Paul ?
Il se tourna vers elle brièvement et elle fut frappée. Son visage était différent, traversée par une méchanceté qui ne lui appartenait pas. Elle ne se démonta pas.
-Vous êtes méconnaissable ! Ce sera cette...chose...C'est de mauvaise augure. Jetez-ça...