Anselmo est le premier vrai amour de George Michael. Brésilien, styliste peu connu, le jeune homme, bien que sincère, a peur de l'aura de la star. Le sida l'emporte alors qu'il est retourné au Brésil. George reste populaire et charismatique mais il change à l'annonce de la maladie d'Anselmo. Il a le sida.
Sony, le presse, ma notoriété, mes fans, ils l'ont terrifié. Anselmo n'était pas prêt à ça. Et moi qui disais prendre des distances en ayant sans cesse le nez sur mes ventes de disque et ma popularité...C'était tellement inopportun, cette façon de faire...J'aurais voulu qu'il n'y ait pas cette pression. Il aurait survécu, car six mois plus tard, tout le monde suivait une thérapie combinée.
Voilà, il y était. Alors cet album fantôme...
En même temps, George voyait les limites de ses réflexions. Oui, ces nouvelles thérapies avaient fait leur apparition mais les rescapés du sida ne tarderaient pas à constater que même avec cette aide,il mèneraient une vie difficile. Des hommes de cinquante ans dans un corps d'octogénaires, George en croiserait plus tard. Et joints à leurs maux physiques, il y aurait cette mise à distance et ce mépris à peine voilés dont on les entourerait. Alors n'était-ce pas préférable que son beau faune brésilien ne soit pas confronté à de telles humiliations ? Sans compter que lui George, serait resté très célèbre. Alors ? Il ne savait pas, vraiment pas...
Alors, il restait les fêtes mondaines, toujours très nombreuses, les fêtes privées moins protocolaires et nettement plus débridées et l'alcool, les poudres, les pilules...Sa lenteur à composer son nouvel opus leur était redevable, c'est du moins ce qu'il alléguait. Il avait souvent l'esprit embrouillé...Il y avait les amis célèbres, l'incontournable Elton John aux tenues bariolées et aux innombrables paires de chaussures, Boy George le chaleureux et d'autres. Et quelques altesses dont cette Lady Diana qui le regardait avec la curiosité d'une femme amoureuse, parfois...
Et après cette traversée du rien, il commença à se redresser. Pendant deux ans, il chanta beaucoup dans des galas où on levait des fonds pour lutter contre le sida. En 1992, il chanta pour La Fondation Mercury de lutte contre le sida, pour un concert anniversaire de sa mort et il soutint aussi Le Red Hot Organization qui recueillait des fonds pour traiter cette même maladie. A New York, en décembre 1993, il était au Madison Square Grade pour le Elisabeth Taylor Aids Foundation et il ne s'arrêta pas là.
Il restait célèbre et productif malgré son chagrin. Sa chanson Too Funky eut un énorme succès. Thierry Mugler en réalisa un clip avec les mannequins et actrices Linda Evangelista, Shana Zadrick, Eva Herzigova, Nadja Auermann et Emma Sjöberg. George n'y apparaissait qu'à la fin, en cinéaste et il était magnifique. Il avait eu trente ans et sa beauté, soigneusement entretenue, ne déclinait pas. Mince mais athlétique, le regard clair et vibrant, la chevelure soigneusement travaillée, le sourire étincelant et les vêtements toujours choisis avec soin, toujours parfaitement adapté, il imposait une image sophistiquée et pleine de classe. Magnétique, fascinant, il était conscient de son talent qui lui donnait tant de forces...Même déchiré intérieurement par la mort de l'être aimé, il s'affirmait et portait beau comme rien dans son corps ni son visage ne devaient révéler la moindre fêlure, le moindre manquement à lui-même. Il connaissait les poncifs concernant la gloire : si brillant et si tourmenté, qui l'aurait cru ? Mais il semblait les déjouer. S'il pensait qu'Anselmo aurait pu lui être donné pour bien plus longtemps, il le gardait pour lui. Ces filles dans Too Funky, belles, désirables, aussi inaccessibles que des déesses, ces filles qui chantaient ces chansons puisque tout le monde les chantait étaient là pour le vénérer, images d'un public féminin toujours fourni et admiratif. De sa voix si mélodieuse, il pouvait donc embraser l'univers entier.
Et puisqu'il en était ainsi, il continuerait, malgré les rumeurs et son désir profond, à être ce bel homme charismatique.
Mais tout de même, une mutation s'opérait...