Partie 3 : épilogue.

Il fit tant et si bien, qu'irritée chaque fois que je le voyais d'entendre les mêmes plaintes et les mêmes arguments que, sottement, je décidai de vider mon sac, les critiquant l'un et l'autre et le sommant d'arrêter de tout justifier faussement. Vincent n'était pas homme à avoir des colères violentes. Il m'écouta mon laïus, mi sidéré mi amusé puis soupira. Ce genre de discussion ne conduisait nulle part, j'aurais dû le comprendre.

C'était un fin d'après-midi et je l'avais rejoint après de longues errances dans Manhattan. Après mes coups d'éclat et sa bouderie, j'aurais pu partir mais, concernée malgré tout par ce jeune homme insaisissable et buté, je restai. Il m'embrassa, ce à quoi je m'attendais et je ne pus m'empêcher de frémir. Il devait être délicat avec une femme, sachant la caresser, lui palper les seins et en lécher les pointes. Il n'appartenait qu'à moi de céder. Qui sait si je ne m'en ferais pas un vrai allié en acceptant d'avoir une intimité avec lui ? Il éprouvait une sorte de tendresse pour moi et je la lui rendais. Nous restâmes un moment enlacés, à nous caresser. Sa peau était douce et claire, ses gestes sûrs et tout en lui était sensualité. J'étais loin de Phillip et de cette tension dans laquelle il m'avait maintenue. Mais il me vint à l'esprit que je ne pouvais aller plus loin...

-Je ne vais pas rester.

-Si. Je sais que si.

-Vincent...

-Tu n'aimerais pas ...

-Si mais dans un autre contexte et je crois, dans une autre vie...

-Tu devrais rester.

-Je suis mariée et je vis dans le Montana.

-D'accord mais tu n'es pas morale. Tu l'as revu, on se revoit. J'aimerais te mettre enceinte. Un enfant entre nous, ce serait bien, oui...

-Tu es sûr ?

-Je ne sais pas. Je raconte beaucoup d'histoires...

-On dirait bien.

-Tu ne voudrais pas qu'on fasse un enfant ?

-Tu ne connais pas d'autres femmes ? Il y en a bien une ici qui te plaît, n'est-ce pas ?

-Avec toi, tout serait différent...

Le dernier jour arriva et je fus abrupte.

-J'ai du mal à te suivre, Vincent. Je te trouve plus démuni qu'avant. Je pensais que tu t'en sortais bien avec la musique mais je finis par âtre perplexe ... Tu attends Phillip mais on dirait que tu es en difficulté avec lui. devrais vraiment prendre soi de toi et cesser de rêver. Les années passent, fais attention à ce que tu es.

-Il aura eu l'avantage jusqu'au bout, celui-là !

-Ce n'est pas si sûr et sa position n'est pas si enviable. Toi, tu n'as pas autant de certitudes. Je t'aime bien.

Dès que j'eus parlé, son attitude changea totalement. Il cessa d'être futile et se montra au contraire calme et attentionné, cessant de me provoquer. Il me dit se souvenir des poèmes, les avoir aimés et regretté que nous ayons joué à des jeux si cruels. Toutefois, il prenait la mesure de ma nouvelle fermeté.

-Tu ne chercheras pas à nous revoir, je parie !

-Je ne sais pas.

-Tu ne sais pas ? Phillip est sûr que oui, moi que non.

-Je me souviendrai de vous.

-Ah tu vois !

Mon taxi arrivait et j'embrassai Vincent sur la joue. Bientôt, son amant serait là et ils reprendraient leurs étranges relations. Mais nos chemins risquaient fort cette fois-ci de rester parallèles. L'intransigeant galeriste et lui,le trentenaire un peu perdu échappaient à ma sphère. Dès que je fus en route pour l'aéroport, je le compris.

Je fus singulièrement heureuse de rentrer chez moi, auprès de Zacharie , à qui je cachais bien sûr ce qu'il n'avait pas à savoir. Il me trouva un peu tendue et je me promis d'éviter désormais tout flou avec lui. L'avoir rencontré était pour moi une grande chance ! Je découvris au bout de quelques mois que j'étais enceinte de lui et que j'en étais très heureuse. Il en était ravi lui-aussi. J'allais donner naissance à une petite fille qui se nommerait Ruth, Louise ou Carolyn et j'allais écrire encore et encore sur des femmes fortes au destin solide, loin de toute rêverie...

Quoi de mieux ?