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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
28 novembre 2022

Clive, le Vengeur. Partie 4. Le restaurant.

VOYAGES

Après de cruelles mésaventures amoureuses et un divorce, Clive change de vie et devient restaurateur.

Il m’a fallu un an et demi pour me décider puis j’ai quitté ma boite. A Newark, j’ai repéré un café-restaurant qui périclitait près de l’aéroport et je l’ai racheté. Mon idée, c’était de l’ouvrir le soir avec, trois fois par semaine, des spectacles : de la musique ou de la danse ou encore des sketches comiques. Les gens viendraient pour manger des choses simples et pour se divertir. Mais attention, je voulais que ce soit de qualité. J’engagerais pas le premier guitariste venu !

L’autre idée, c’était les auréoles de lumière autour des artistes. Les éclairages en somme. Je veillerais à ce que soit très bien fait…

J’avais de l’argent de côté et j’ai fait un emprunt. Ce qui m’a aidé, c’est de l’argent que j’ai reçu. Il  ne venait pas de Barney. Il venait d’Erik. J’en ai été stupéfait et le chèque est resté des semaines entières dans son enveloppe. Il n’était accompagné d’aucun message. Au bout du compte, j’ai eu l’intuition qu’il fallait l’encaisser. Comme quoi…

Après la clôture brutale de notre relation et le délitement de mon mariage, j’avais compris que changer de vie était impératif. J’ai retrouvé la photo que j’avais envoyée au décorateur si mondain pour être sélectionné. J’en ai fait une copie et je l’ai trimballé partout avec moi. C’est ce Clive plein de promesses que je voulais faire revivre. Il n’abandonnerait ses rêves d’adolescent pour étudier dans une fac miteuse avant de déclarer forfait par manque d’argent. Il ne renoncerait pas aux chanteurs, aux musiciens et, de façon plus générale,  au monde des arts…

Je m’approcherais d’un certain type d’artistes, pas ceux qui sont tout en haut pour sûr, et, à ma manière, je leur ferais du bien. Donc je me contenterais pas d'un lieu où on aime venir diner. Non, il y aurait des spectacles…

Comme je l'ai dit, j'avais une mise de fond et  avec l'argent d’Erik, ça faisait une somme qui n’était pas colossale mais quand même, c’était bien. J’ai acheté le local, fait faire les travaux, fait moi-même trois mille choses et engagé du monde : un cuistot, des employés de cuisine, des serveurs, un barman…

Erik, j’aurais bien voulu qu’il sache ce que je faisais  mais devant l’ampleur des dégâts, je n’ai pas insisté. Il faut dire…

Par contre, la copie de la photo, je l’ai envoyé à l’amicale des anciens de mon lycée, histoire de retrouver Kirsten Brewning, la jeune fille qui m’avait fait découvrir le Lac des cygnes…Incroyable mais vrai, elle m’a répondu. Pas tout de suite, quand même. Elle s’était mariée toute jeune avec un mec qui l’avait emmenée au Texas et ils avaient passé dix-huit ans à Houston. Elle était fraîchement divorcée et était revenue elle-aussi à Newark. Elle y avait ouvert une petite librairie qui tournait correctement. Elle avait eu deux enfants qui faisaient des études dans de petites universités voisines. Elle restait en bon terme avec son ex-mari. Cette photo ancienne, elle l’adorait car elle la renvoyait à une époque différente de sa vie, une époque où elle était jeune et pleine d’allant…

Je savais que je la reverrais. Beardsley, par contre, bien que je l’aie lui-aussi contacté, c’était moins sûr. Il avait contracté je ne sais quelle maladie orpheline et le pauvre, il était « aux bons soins » de sa mère. Estimant que lui, il devait avoir désormais aux alentours de soixante-cinq ans, je me demandais quel âge elle pouvait avoir, sa tôlière…

Il m’a envoyé une gentille réponse mais j’ai senti les gros ennuis.

Quant à mes vieux, ils s’étaient radoucis. Faut dire que me voir monter aussi rondement une affaire et la faire tourner aussi vite, ça leur en a bouché un coin. Au début, ils venaient là, furtifs. Puis, ils ont déjeuné de temps en temps…Le temps qu’ils aient pigé la carte, bref…

Un an après mon entrée dans les lieux,  j’avais bien compris ce qu’il fallait faire et ça roulait. Il parait que la clé de réussite, pour une entreprise qui tient la route, c’est  le concept de départ. Je souscris assez à cette idée parce que n’oubliez pas que, des années durant, j’avais assuré toutes sortes de boites dont certaines avaient les bonnes recettes et d’autres franchement pas…

L’idée, c’était de commencer par une base fixe : des gens au standing moyen qui avaient envie d’un cadre agréable où ils pourraient faire ce qu’ils faisaient toujours : écouter de la bonne musique tout en descendant des bières. Et puis, lentement et sûrement, il fallait les amener à écouter un groupe ou une chanteuse qu’ils auraient au départ rejeté en bloc ou encore à aller regarder dans la salle les dessins ou les peintures d’un jeune créateur ou d’une jeune créatrice dont ils se disaient qu’en fin de compte, ils avaient des choses à leur dire. Si on ajoutait à cela, qu’ils ne mangeaient pas au bout de compte ce qu’ils voulaient avoir dans leurs assiettes au départ et en arrivaient à commander un cocktail de mon inspiration ou un verre de vin français, le virage s’accentuait. En fin de compte, grâce à mes coups de pub (payants) et au bouche à oreille (gratuit), je refusais du monde le weekend et j’étais cité comme un bon plan très plausible dans divers guides. Encore fallait-il que les voyageurs qui sortaient de l’aéroport aient envie de me rendre visite…Ce n’était pas forcément le cas mais rassurez-vous, il y avait les autres…

J’ai même retrouvé mes collègues de boulot, enfin  plusieurs d’entre eux, assis à des tables et passant commande et deux ou trois fois, mon ancien boss.

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